Me Nabila Slimi est membre du collectif de la défense du général à la retraite, Ali Ghediri, placé en détention provisoire depuis le 13 juin 2019, à la prison d'El Harrach, dans la banlieue Est d'Alger. La défense d'Ali Ghdiri a peu communiqué sur l'affaire du général à la retraite, où en est son dossier ? Il y a eu, en effet, une très faible couverture médiatique de l'affaire, comme de lourdes accusations pesaient sur la personne de Ali Ghediri, à savoir trahison et complicité, ainsi que atteinte au moral des troupes. Le dossier est d'abord resté une année au niveau de l'instruction. Il a été traité en première instance au tribunal de Dar El beida. En mars 2020, le juge d'instruction a décidé d'envoyer le dossier avec une ordonnance à la chambre d'accusation qui a fixé une date pour l'examiner. Le 18 mars donc, la chmabre d'accusation a ordonné une instruction complémentaire et le juge d'instruction a instruit le dossier partiellement en raison des conditions sanitaires liées àa la pandémie du Covid-19. En mai, le dossier a été renvoyé à la chambre d'accusation qui l'a réexaminé 15 jours après, soit le 3 juin. Le 10 juin, la chambre d'accusation a rendu son verdict. Monsieur Ali Ghediri n'était plus accusé de trahison, mais seulement d'atteinte au moral des troupes, avec rejet, pour la seconde fois, de la demande de liberté provisoire. A partir du 10 juin 2020, on avait deux choix : attendre que le tribunal criminel programme l'audience de son procès ou de passer par un pourvoi de cassation auprès de la cour suprême, et c'est pour la deuxième option qu'a opté Ali Ghedir. Pourquoi le choix du pourvoi de cassation ? Ali Ghediri était à moitié satisfait. Autant il n'y a jamais eu lieu de trahison, autant il rejette catégoriquement l'accusation portant atteinte au moral des troupes. Nous avons donc respecté son choix. On a fait le pourvoi en cassation le 15 juin 2020 et nous avons déposé hier le mémoire comportant tous les justificatifs y afférant au niveau de la chambre criminelle de la cour suprême. Mais opter pour cette option retarde forcément la programmation du procès ? Nous sommes, malheureusement, face à une situation que nous ne souhaitions pas. Le dossier se trouve maintenant au niveau du service de pourvoi de la cour d'Alger. Il doit impérativement rester dans ce service conformément à la procédure pénale. Nous avons ainsi un délai de 60 jours pour déposer nos mémoires. Ajouter à cela deux mois supplémentaires pour que la cour d'Alger envoie le dossier à la chambre criminelle de la Cour suprême. Nous ne pouvons donc rien faire avant le 20 ou le 25 octobre 2020. Il faut savoir aussi qu'aucun délai n'est fixé à la Cour suprême pour statuer sur le dossier, cela peut donc prendre trois comme six mois. Et pendant cette période, monsieur Ali Ghediri restera derrière les barreaux. Est-il vrai qu'Ali Ghediri a refusé de bénéficier d'une remise en liberté provisoire ? Il a plutôt refusé qu'il soit libéré par pitié, avec maintien des accusations qu'ils rejettent catégoriquement .Etant donné que nous sommes face à un dossier où les éléments matériels des deux accusations n'y figurent pas, nous avions donc tous rejeté ces poursuites. Nous pensions que le juge d'instruction allait finir par comprendre qu'il s'agissait d'un complot et qu'Ali Ghediri a été mis en isolement à cause de sa candidature aux élections présidentielles d'avril 2019. Le 12 juillet prochain nous déposerons une troisième demande de liberté provisoire, en espérant qu'il y'aura un abandon de la deuxième accusation dont les éléments sont absents dans le dossier. Nous croyons en la justice algérienne, aux promesses de du président qui est le premier magistrat du pays, de même que nous refusons toute interférence. Tout ce que nous demandons est que monsieur Ghediri soit jugé conformément à la loi. Malgré l'abandon des accusations de trahison Ali Ghediri sera tout de même jugé à la chambre criminelle. Pourquoi ? Nous avons été déçus, de ce point de vue, comme cette accusation a été requalifiée pour certains détenus contrairement au cas d'Ali Ghdiri. Il a été accusé d'avoir commis un crime, atteinte au moral de l'armée, dont la peine maximale est de 5 ans. Qu'en est-il des conditions de son incarcération ? Il n'a jamais parlé négativement du comportement du personnel de la prison. Pourquoi tous ces détails n'ont pas été communiqués avant ? S'agissait-il d'une stratégie de défense ? Le dossier d'Ali Ghediri a été considéré, dès le début, comme étant ordinaire, à savoir une personne qui n'est pas reconnue comme détenu d'opinion. Pourtant, il a été incarcéré parce qu'il s'est présenté aux élections présidentielles d'avril 2019. Et peu de gens connaissent cette vérité. Nous avons tenté plusieurs fois de médiatiser l'affaire, mais l'instruction a pris beaucoup de temps. Nous n'avions pas d'informations à donner sauf que le dossier est au niveau du juge d'instruction ou à la chambre d'accusation. Mais depuis de 18 mars, nous avons quand même enregistré une importante couverture médiatique suite au déclenchement de l'instruction complémentaire. Entretien réalisé par Mohamed Iouanoughen / Kenza Sifi