Au lendemain de l'échec de la médiation de la Cédéao, les leaders de la contestation au Mali ont appelé leurs partisans à rester mobilisés jusqu'à la démission du chef de l'Etat. L'organisation de la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) a essuyé un refus catégorique des propositions qu'elle a exposées à la coalition de l'opposition du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), à l'issue de deux jours d'intenses discussions à Bamako, pour une sortie de crise au Mali. Dans son communiqué rendu public vendredi soir, la coalition M5-RFP a non seulement affirmé son rejet des propositions de la Cédéao, mais elle se fixe désormais comme seul objectif la démission du président malien Ibrahim Boubacar Keïta, avant de s'engager dans toute autre initiative politique. "Tout en reconnaissant le caractère juste et légitime de ses points de vue, le M5-RFP s'est entendu invariablement dire par la Cédéao que la démission de M. Ibrahim Boubacar Keïta, bien que n'étant pas contraire à la Constitution, est pour elle une ligne rouge", affirme le communiqué du M5-RFP, alors que "tout au long des discussions la délégation du M5-RFP a réitéré ses demandes formulées dans différentes déclarations, dont notamment la démission d'IBK des fonctions de président de la République avec son régime corrompu". Lors des discussions de vendredi, la Cédéao a exigé que le président IBK reste en place, en proposant comme solution pour une sortie de crise la "reconstitution" de la Cour constitutionnelle, au cœur du scandale des législatives du printemps dernier et qui sont à l'origine de ce mouvement de révolte contre le président et son entourage. La Cédéao a proposé aussi la formation d'un gouvernement d'union nationale "dont la moitié des membres sera nommée par le président", alors que le M5-RFP a exigé dans son mémorandum du 30 juin 2020 un gouvernement de transition, dont le Premier ministre sera désigné par l'opposition, souhaitant réduire le poste de président de la République à une fonction honorifique. Evoquant les propositions de la Cédéao, l'opposition malienne affirme : "C'est avec surprise que le M5-RFP constate que la Cédéao, supposée trouver des solutions à la crise dans le respect de la Constitution malienne, a procédé à des arrangements qui violent précisément ladite Constitution et qui ne tiennent aucunement compte du contexte sociopolitique et des risques majeurs que la gouvernance d'Ibrahim Boubacar Keïta fait peser sur l'existence même du Mali en tant que nation, république et démocratie." Depuis la tuerie du 10 juin, qui a coûté la vie à 11 manifestants à Bamako, l'opposition réunie au sein du M5-RFP a radicalisé son mouvement, ne cessant aussi de voir ses rangs grossir au fil des semaines, dans un contexte marqué par de nombreux scandales de corruption impliquant le fils du président et des membres de la majorité présidentielle. Mais au vu de la situation sécuritaire du pays, qui a déteint négativement sur les autres pays du Sahel, toute instabilité politique au sommet de l'Etat est perçue par la médiation internationale comme un danger supplémentaire sur le Mali et ses voisins. Ce pourquoi le départ, dans ces conditions, de l'actuel président est en partie considéré comme une "ligne rouge" par la Cédéao et malvenu par l'Union africaine, l'ONU et l'Union européenne. Lyès Menacer