L'opposition a estimé hier que le président malien a prouvé, à travers son intervention au sommet de la Cédéao, qu'"il doit partir pour les intérêts du pays", "pour les intérêts de la démocratie au Mali". Les quinze membres de l'organisation de la Communauté économiques des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), réunis hier en sommet extraordinaire virtuel, consacré à la crise politique au Mali, ont proposé la mise en place d'un gouvernement restreint, limité aux fonctions régaliennes, et la tenue de législatives partielles, selon les conclusions rendues publiques en fin de journée. Ce cabinet devrait assurer sa mission jusqu'à la mise en place d'un gouvernement d'union nationale, auquel sont appelés à participer des membres de l'opposition et de la société civile, avec 30% pour les premiers et 20% pour les seconds, tandis que le parti au pouvoir aura droit aux 50% des portefeuilles ministériels, comme cela avait été mentionné dans les propositions formulées le 19 juillet dernier par la Cédéao. Mais la coalition de l'opposition, réunie au sein du Mouvement du 5 Juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) avait déjà rejeté ces propositions, exigeant en premier lieu la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), la mise en place d'un gouvernement de transition et la dissolution du Parlement. Pour mettre la pression sur le M5-RFP, la Cédéao brandit des sanctions à l'encontre de ceux qui refuseraient ses propositions. Cette organisation régionale prévoit en effet des sanctions "contre ceux qui poseront des actes contraires au processus de normalisation" politique, qu'elle affirme mettre en place dès vendredi. Elle a exigé par ailleurs la démission des 31 députés, à l'élection contestée par l'opposition, lors du scrutin législatif des 29 mars et 19 juin derniers. Ce scrutin est la goutte qui a fait déborder le vase et donné lieu à un mouvement de contestation sociale et politique qui s'est transformé en front exigeant la démission d'IBK. Les conclusions de la Cédéao risquent toutefois de rester au stade de discours, puisque l'opposition malienne est déterminée à chasser IBK et son entourage du pouvoir au Mali. Et tout coup de force de la part de cette organisation pour imposer un changement à sa manière pourrait entraîner le Mali dans un nouveau cycle de violences, qui ont déjà fait, le 10 et le 11 juillet dernier, 12 morts parmi les partisans du M5-RFP, lors d'une manifestation pacifique à Bamako. Pourtant, dans son discours d'ouverture, le président du Niger Mahamadou Issoufou a affirmé que la situation que connaît la mali "interpelle au premier chef tous les Maliens", expliquant que le rôle de la Cédéao se limite à accompagner ce pays vers un changement positif. Aussi, le M5-RFP avait affirmé, dans un document qu'il avait remis vendredi à des représentants des la Cédéao à Bamako, que le problème n'est pas d'ordre électoral, mais il s'agit d'une question de mauvaise gouvernance qu'il impute au seul IBK et à la majorité présidentielle. IBK, prenant la parole depuis son palais présidentiel à Bamako, a affirmé que "ceux qui prennent la rue veulent imposer une transition et faire un coup d'Etat rampant pour mettre en cause la laïcité du pays", en référence à l'imam Mahmud Dicko, un des leaders du M5-RFP. Cette déclaration a provoqué une vive réaction de l'opposition qui a estimé hier que le président malien a prouvé, à travers son intervention au sommet de la Cédéao, qu'"il doit partir pour les intérêts du pays", "pour les intérêts de la démocratie au Mali".