Les délégués du mouvement citoyen, après un débat houleux, ont décidé de laisser les électeurs libres de leur choix le 29 septembre. Plusieurs centaines de délégués représentant neuf wilayas ont assisté aux travaux qui ont commencé par le compte rendu du porte-parole de la délégation qui mène actuellement le dialogue avec le chef du gouvernement. Après avoir proposé l'ordre du jour, la plénière a donné la parole à Belaïd Abrika qui a présenté une synthèse des points discutés lors des dernières rencontres avec Ahmed Ouyahia ainsi que les “nouveaux acquis arrachés par le mouvement citoyen”. La nouveauté est qu'un accord a été trouvé en ce qui concerne la télévision en tamazight. L'accord stipule que les trois chaînes publiques actuelles doivent chacune diffuser un programme quotidien de deux heures, et ce incessamment, en attendant que le volume horaire de cette tranche passe à trois heures quotidiennes de programme berbère à partir de 2006. Année au cours de laquelle le téléspectateur verra, en principe, avec l'arrivée de la TNT — la télévision numérique terrestre — une chaîne amazighe autonome qui aura d'ici-là engrangé assez de programmes pour être lancée. L'enseignement de tamazight, lui, n'est plus aléatoire là où la disponibilité de l'encadrement pédagogique le permet. Cette matière devient même obligatoire pour tous et rentre dans le calcul des moyennes trimestrielles et annuelles. De même qu'elle sera comptabilisée dans les épreuves du bac et du BEF à partir de l'année scolaire 2006/2007. Abrika annonce, également, l'ouverture de 526 postes budgétaires pour le tamazight et la prise de mesures spécifiques pour la création de poste d'inspecteur en cette matière. Il reste que le nœud gordien de cette question, à savoir son officialisation et sa constitutionnalisation, n'est toujours pas définitivement tranché même si “le principe d'une officialisation sans référendum est acquis”. Le porte-parole des archs a également évoqué le point 11 de la plate-forme d'El-Kseur et qui recommande la mise sous l'autorité effective des instances démocratiquement élues de toutes les fonctions exécutives de l'Etat ainsi que des corps de sécurité. Il a été convenu que cela devait attendre une prochaine révision du code de wilaya et du code communal afin de créer les mécanismes juridiques qui permettent aux élus locaux de disposer de prérogatives plus élargies. Concernant le point 13 de la plate-forme et qui s'élève contre la hogra, l'injustice et l'exclusion, Abrika annonce qu'un observatoire de lutte contre la corruption, le piston et le blanchiment d'argent va bientôt être mis en place et des institutions comme l'IGF et la cour des comptes seront, par ailleurs, touchées par la transparence ; en ce sens que leurs activités seront rendues publiques. Le dernier point évoqué, celui de la revendication d'une allocation de chômage octroyée à tout demandeur d'emploi à hauteur de 50% du SNMG, aurait également trouvé satisfaction dans le principe toujours car il reste à trouver les mécanismes adéquats pour le rendre effectif. Pour finir, Belaïd Abrika a parlé d'une charte citoyenne énumérant les droits du citoyen et ses relations avec les pouvoirs publics. Une charte qui sera bientôt élaborée avec le concours du mouvement citoyen. À l'issue de cette synthèse présentée par le porte-parole, les différentes coordinations se sont retirées pour se concerter. Une concertation qui a vu un débat très long s'engager principalement autour de la levée du principe de rejet de toute élection avant la satisfaction pleine et entière de la plate-forme d'El-Kseur. C'est donc en début de matinée de vendredi que la plénière a repris ses travaux pour entendre les positions de chaque coordination de wilaya. Concernant l'évaluation du dialogue, les coordinations ont renouvelé leur confiance à la délégation mandatée pour le dialogue et semblent globalement satisfaites des acquis jusqu'à présent arrachés, même si, au vu des promesses faites au nom de l'Etat par Ahmed Ouyahia et des engagements qui attendent leur concrétisation sur le terrain, le véritable bilan reste toujours à faire. C'est en abordant le chapitre de la position du mouvement par rapport aux élections que des divergences profondes sont apparues entre une tendance radicale arc-boutée sur le principe du rejet de toute élection jusqu'à satisfaction de la plate- forme et un courant modéré qui voudrait remiser au placard un principe qu'il juge dépassé pour passer à une autre étape dans la lutte que le mouvement a engagé depuis 2001. La tendance générale était pour la levée du rejet puis de laisser le libre choix aux citoyens de se déterminer en toutes âme et conscience par rapport à la charte de réconciliation nationale d'abord ensuite vous avez les élections du 24 octobre. Le clash que tout le monde attendait a eu lieu en plénière lorsque certaines coordinations communales ont menacé de se retirer définitivement si on remettait en cause ce principe de rejet des élections. Certains principes directeurs énoncés par le mouvement, comme l'interdiction de toute visite d'officiels en Kabylie ou le deuil décrété à l'issue des évènements tragiques de 2001, sont devenus caducs de fait. Sans qu'ils soient levés à un moment ou à un autre par l'interwilayas. C'est finalement en début d'après-midi que le fameux consensus sur le principe du rejet de toute élection a été atteint tôt en laissant au citoyen le choix de se déterminer selon ses convictions. Ainsi donc, en évitant d'assumer une position tranchée pour ou contre la réconciliation nationale, le mouvement des archs tente de maintenir sa cohésion en ménageant un pouvoir qui est devenu un partenaire et une base qui reste frondeuse et notamment imprévisible. D. A.