C'est donc sans surprise que la Chambre basse du Parlement, en attendant le Sénat aujourd'hui, a adopté jeudi à l'unanimité la mouture de la nouvelle Constitution qui sera soumise à un référendum populaire le 1er novembre prochain. Et comme attendu, à l'exception des partis de la mouvance démocratique et certaines formations islamistes, ce sont les mêmes partis, dont notamment ceux qui forment la majorité parlementaire, en l'occurrence le RND et le FLN, et qui ont soutenu jusque-là toutes les politiques gouvernementales de l'ère Bouteflika et adopté tous les projets de loi qui leur ont été soumis, qui ont donné leur quitus à la nouvelle loi fondamentale. En expédiant un texte d'une telle importance, sans débat — probablement en raison du déficit de crédibilité dont il jouit —, le Parlement controversé vient à nouveau de donner la preuve de sa réputation d'une simple chambre d'enregistrement. Mais, peut-on attendre autre chose d'une Chambre parlementaire dont des députés se sont donnés en spectacle en 2018 en cadenassant la porte du bureau du président de l'Assemblée, qui se sont opposés à plusieurs commissions parlementaires proposées par l'opposition et qui viennent d'être éclaboussés par les révélations de Baha Eddine Tliba, aujourd'hui sous les verrous ? Si elle s'est finalement révélée comme une simple formalité, cette adoption ouvre désormais la voie au référendum. Mais il reste, cependant, la question de fond : comment les autorités s'y prendront-elles pour mobiliser la population et susciter l'adhésion des électeurs dans un contexte politico-économico-social aux multiples inconnues ? Jeudi, en marge du vote sur le texte, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement a annoncé l'ouverture d'un large débat dans les prochains jours et dans lequel "tous les médias écrits et audiovisuels seront mobilisés". Ce débat sera ouvert avec la "société civile, les associations, les personnalités, les experts, les partis agréés et toutes les franges de la société algérienne pour les associer au processus référendaire", a-t-il dit. Le ministre ne précise, cependant, ni le format que prendra ce débat ni sur quoi il portera, sachant qu'il n'existe aucune possibilité d'amendement. Il s'agirait donc, a priori, d'une opération de vulgarisation et de sensibilisation à travers un grand tapage médiatique aux fins de susciter l'adhésion des Algériens. Mais le défi s'annonce immense pour le gouvernement pour plusieurs raisons. D'abord, les circonstances ayant entouré l'élaboration du texte. Confiée à un panel d'experts désignés par la Présidence, l'élaboration de la mouture n'a pas bénéficié d'une large concertation populaire et ne répond pas, aux yeux de certains, aux revendications exprimées par le mouvement populaire. Ensuite, l'absence d'un véritable débat autour de la mouture distribuée en pleine pandémie et n'ayant associé que des acteurs intéressés de la classe politique et de la société civile évoluant, pour la plupart, dans la périphérie du pouvoir. Enfin, le contexte politique marqué par le maintien en prison de nombreux "hirakistes", de certains journalistes, le verrouillage médiatique devant l'opposition et la dégradation des conditions socioéconomiques. Des données qui risquent probablement de plomber l'intérêt et l'engouement recherchés.