L'unité des urgences pour les asthmatiques du CHU d'Oran, qui ne dispose que de 8 lits, reçoit quotidiennement près de 100 patients (!) et cela en période normale. “Avec la canicule qui sévit depuis plusieurs jours, le nombre d'asthmatiques à venir aux urgences peut atteindre 120”, précise le professeur Berrabah. Une situation sanitaire difficile à gérer et qui prouve que l'asthme à Oran est en constante augmentation. Dans la petite unité des urgences, nous avons trouvé des malades en détresse respiratoire, placés sous oxygène et perfusion. Ce sont surtout des hommes âgés. La famille d'un patient est dans le couloir à attendre des nouvelles, une femme essuie ses larmes, souffrant et angoissant pour ce parent hospitalisé. C'est surtout son impuissance devant les difficultés respiratoires de son père qui la font ainsi craquer. Le professeur Berrabah nous explique que les fortes chaleurs, en cette fin du mois de juin, incommodent énormément les malades et peut même être dangereux pour ceux ayant des antécédents. “La stagnation de l'air, le taux élevé d'humidité plus la pollution font que les malades souffrent. Il leur faut parfois 4 à 5 heures de prise en charge avant de les laisser sortir, ce qui fait que l'unité des urgences tourne énormément. Parfois, des cas graves sont amenés au service des asthmatiques.” Notre interlocuteur poursuit que ce sont souvent des hommes qui sont ainsi amenés aux urgences, leurs antécédents tabagiques aggravant leur cas. L'autre constat mené par les professionnels de la santé, c'est la prévalence de l'asthme dans les communes d'Arzew et de Bethioua là où est implantée la zone industrielle pétrochimique. Pour les malades souffrant d'asthme et résidant dans ces deux daïras, la seule solution lors d'une crise est de se déplacer jusqu'au CHUO. Un trop long trajet qui peut s'avérer fatal lors d'une détresse respiratoire. Les cas de malades asthmatiques décédés lors de leur transfert sont connus. La solution, ou du moins un début de solution, serait l'ouverture d'une unité des urgences pour les asthmatiques au niveau d'Arzew ou de Bethioua, avec le concours financier des industries activant dans la ZI qui sont les premiers responsables de la pollution, facteur aggravant de l'asthme. C'est la proposition qu'aimeraient soumettre des médecins aux autorités sanitaires de la région et au ministère de tutelle.“C'est dans cette logique, d'ailleurs, qu'une unité des urgence contre la tuberculose et les maladies respiratoires doit être implantée très prochainement à l'hôpital Mohgoun”, nous dira encore le professeur Berrabah. D'ici là, pour tous les asthmatiques de la région, c'est encore et toujours la souffrance qu'il faudra gérer, et lorsque l'on voit les torchères crachant inlassablement leur fumée noire dans le ciel d'Arzew, l'on ne peut que s'inquiéter très sérieusement des effets de la pollution de l'air sur la santé de millions d'Oranais mais aussi sur la couche d'ozone. La canicule de ce mois de juin et les changements climatiques de ces dernières années sont, selon beaucoup de spécialistes, causés par ces types de pollution. À quand une véritable politique de santé de la part des pouvoirs publics ? F. BOUMEDIENE