Dans sa dernière lettre écrite depuis la prison, le général à la retraite a rappelé que "le combat démocratique est par nature rude et long. Il faut l'engager et le gagner". Quatre membres du collectif de défense d'Ali Ghediri, en attente de son procès à la prison de Koléa depuis 16 mois, ont animé, hier, au siège du MDS à Alger, une conférence de presse, au cours de laquelle, ils ont dénoncé une procédure longue pour un dossier vide. "Cela fait plus d'une année que nous allons d'un tribunal à un autre pour défendre des affaires (délits d'opinion, ndlr) sans fondement juridique. J'ai rejoint le collectif de défense d'Ali Ghediri, il y a un mois. Il est accusé d'atteinte au moral de l'armée. De la part d'un ancien haut gradé de l'armée, père et frère de nombreux officiers dans l'ANP ?", a soutenu, interloquée, Me Aouicha Bekhti. "Nous nous sentons impuissants : nous donnons le maximum, mais nous ne pesons pas sur le cours de la justice", a-t-elle regretté. Est-ce un aveu d'abdication ? "Ali Ghediri est un homme qui subit l'arbitraire, comme des centaines de jeunes militants, et aussi Louisa Hanoune qui a fait de la prison pour ses activités politiques. Ni lui ni ses avocats ne sont, pour autant, pessimistes. Nous parlons de la difficulté de notre mission en ce moment. Nous ne lâchons rien, nous ne nous décourageons pas", a-t-elle corrigé. Tranchant, Me Khaled Bourayou a asséné : "S'il y a une justice indépendante, l'affaire de Ghediri n'a pas besoin de défense." Son confrère, Me Chafei, a illustré "cette vérité" par une métaphore. "Y a-t-il besoin d'un avocat pour prouver qu'une feuille est blanche ?" Pour le défendant, le destin du général à la retraite "ne sera pas scellé par des textes juridiques", sous-entendant que seule une décision politique lui fera quitter sa cellule. "Dans cette affaire, il y a un règlement de compte. Une volonté de punir Ghediri. On a ajouté au dossier des faits qui n'étaient pas consignés par le juge d'instruction", a surenchéri Me Bourayou, qui s'est étonné, comme l'a fait quelques instants plus tôt Me Bekhti, qu'on puisse faire croire "qu'une personne seule puisse déstabiliser l'armée". Me Chafei autant que Me Haddad ont mis en évidence la faiblesse de la médiatisation de cette affaire, qui relève, ont-ils insisté, strictement du délit d'opinion après la requalification des faits par la chambre d'accusation de la Cour d'Alger. Cette haute juridiction n'a pas retenu, en effet, l'accusation afférente à la participation à la fourniture à des agents de pays étrangers d'informations qui portent atteinte à l'économie nationale, mais avait confirmé le chef d'inculpation portant "entreprise visant à démoraliser l'armée". Les avocats de l'ancien directeur des ressources humaines au ministère de la Défense nationale avaient, aussitôt, interjeté un pourvoi en cassation de cette décision. Le dossier est toujours pendant. Hier, les proches de Ghediri ont rendu publique la dernière lettre qu'il a écrite depuis la prison. "Mes convictions ne font que se raffermir pour mon combat contre un régime qui a mené le pays à l'impasse. Ce combat vaut tous les sacrifices." Evoquant le Hirak, le général à la retraite a rappelé que "le combat démocratique est par nature rude et long. Il faut l'engager et le gagner". Il a rapidement enchaîné sur l'échéance référendaire : "Comme toute Constitution, elle ne saurait être parfaite. J'espère, néanmoins, qu'elle sera porteuse des principes de Novembre et des aspirations de la révolution citoyenne, le Hirak." Il a conseillé de préserver le pays "de l'anarchie. Seuls les survivants de l'ancien système en profiteraient. Ils sont nombreux, ils sont parmi nous". De son point de vue, ce sont ceux-là qui manœuvrent "dans l'ombre pour que j'y reste (en prison, ndlr)". Souhila H.