Les virologues s'attendent à un pic des contaminations en novembre et décembre, soit à la saison de la circulation de multiples virus respiratoires. Les hôpitaux sont déjà à la limite de la saturation. "Pour les cas de réanimation, je ne peux hélas pas vous aider (...) Pas de place en médecine interne à Beni Messous", a alerté, hier, le professeur Soraya Ayoub sur son compte des réseaux sociaux. Un confrère a aussitôt fait écho à sa publication : "Le service de chirurgie hommes à l'hôpital de Dellys a été cédé au Covid-19. Il a été complet au bout de cinq heures." Des centaines de citoyens affluent quotidiennement vers les unités de consultation Covid-19 des structures hospitalières. Ils engorgent, par là même en amont, les services de radiologie, où ils sont systématiquement orientés pour un scanner thoracique. "Je suis là pour une radio du poignet fracturé. J'attends depuis des heures et je suis mêlée aux patients soupçonnés d'être positifs au Covid-19", se plaint une quadragénaire devant l'unité de radiologie du CHU de Blida. Elle presse son époux de filer vers une clinique privée. "Je ne peux pas rester et risquer une contamination. Regardez-les, il y en a qui ne portent même pas le masque", s'indigne-t-elle. À l'entrée du service, les auxiliaires de santé exhortent les gens à porter la bavette. Une scène surréaliste se produit. Un jeune homme propose un masque, visiblement déjà utilisé, à un concitoyen interdit d'accès à la salle des scanners sans la protection requise. Au CHU Mustapha-Pacha, il y a environ 200 consultations pour suspicion de contamination par le coronavirus qui sont enregistrées chaque jour depuis une semaine, nous affirment des sources hospitalières. La charge sur les équipes médicales et paramédicales augmente substantiellement. Les 25 lits de réanimation, dont dispose ce centre hospitalo-universitaire, sont réservés pour les patients issus de la deuxième vague de contamination par le Covid-19. Les services de néphrologie, de médecine interne, de pneumologie, de neurochirurgie, d'orthopédie, de diabétologie et d'ORL sont déjà sollicités en appoint. Quinze autres services seront probablement mis à contribution dans la prise en charge du flux de malades admis en soins intensifs, nous dit-on. Aux CHU Lamine-Debaghine de Bab El-Oued (ex-hôpital Maillot), Nefissa-Hamoud (ex-Parnet), Issad-Hassani de Beni Messous, Frantz-Fanon de Blida, de Kouba, de Ben Aknoun, de Rouiba... la situation est aussi épineuse. "Les médecins réanimateurs sont affectés aux unités Covid. Je dois moi-même assurer la surveillance de mes malades opérés, alors que ce n'est pas mon rôle", témoigne un maître assistant en chirurgie générale. Pour nombre de praticiens de la santé, il devient de plus en plus difficile de jongler avec les malades relevant de leurs spécialités et les Covid+. "Pourtant, des familles entières sont soignées à domicile. Quand la symptomatologie n'est pas grave, les gens préfèrent éviter les hôpitaux", atteste une chirurgienne. Sur la plateforme Winelka, conçue par une association d'aide aux malades, les recherches sur les laboratoires réalisant les tests PCR, sur les sacs réservoirs d'oxygène et les déclinés commerciaux de l'hydroxychloroquine foisonnent au même titre que des traitements vitaux, désormais indisponibles en officine. La crise sanitaire s'exacerbera, sans doute, avec l'arrivée de l'hiver. Le docteur Yahia Mekki, expert en virologie, a déclaré à radio Sétif que la Covid-19 atteindrait son pic de contaminations en novembre et décembre, soit à la saison de la circulation d'une vingtaine de virus respiratoires. Très alarmiste, il a indiqué que les gènes du virus ont subi des mutations, "qui les rendent plus agressifs et dangereux". Ce qui augure, de son point de vue, une deuxième vague potentiellement fatale pour la population vulnérable (malades chroniques, personnes âgées, fumeurs, obèses...). "Le manque de rigueur, les regroupements, le non-respect des mesures de prévention dans les lieux publics sont les facteurs de la hausse importante du nombre de cas contaminés", a-t-il précisé, focalisant sur les risques induits par les Covid+ asymptomatiques. Souhila Hammadi