Tout en déplorant la perte de leur collègue, les médecins dénoncent le manque de moyens de protection pour les praticiens de la santé. Au lendemain du décès du Pr Si Ahmed El-Mahdi, chef du service de chirurgie générale au CHU Frantz-Fanon de Blida, des suites du Covid-19, des médecins, des professeurs et le personnel soignant lancent un nouvel SOS pour équiper l'ensemble du personnel de la santé de moyens de protection contre ce virus. Rappelons que le défunt Si Ahmed, après avoir été admis en réanimation, a succombé au coronavirus dans la nuit de dimanche. Pr Soukehal Abdelkrim, spécialiste en médecine préventive, ex-chef de service au CHU de Beni Messous, a dénoncé l'absence de mesures de protection en milieu hospitalier. Pour lui, "le décès de Si Ahmed, qui était sur le front contre le coronavirus, me fait rappeler le drame des 11 médecins tués par l'épidémie Ebola en 1976 à Yambuku dans l'ex-Zaïre, actuellement République démocratique du Congo. L'heure est aujourd'hui grave, il y a d'autres professionnels de la santé qui ont été contaminés durant l'accomplissement de leur mission. Il est inadmissible de livrer en 2020 des soignants et autres à une bataille contre un virus mortel sans un minimum de précautions. On est en train d'envoyer nos soignants sans équipements de guerre ni de munitions contre un virus qui a la vocation d'une arme de destruction massive. Le personnel de santé, toutes catégories confondues, mène une guerre implacable contre cette maladie respiratoire dangereuse, sans un minimum de protection. On est en train de faire dans la gestion du risque. Il faut penser à outiller nos médecins, nos infirmiers, les agents, si l'on veut vraiment gagner cette bataille qui s'annonce dure". L'expert en santé publique et hygiène Pr Abdelkrim Soukehal estime aussi que "l'Algérie est en décalage d'un siècle en matière de protection du personnel soignant qui est à l'avant-garde. On doit interdire de circuler dans les services de l'hôpital avec une simple blouse et un stéthoscope autour du cou. Il faudra désormais les équiper de tenues et de combinaisons, de masques, de souliers de travail. Il faudra aussi sécuriser leur circuit de travail. Si on continue à déplorer des morts parmi le corps soignant qui va prendre en charge les malades du Covid-19, ces derniers sont en première ligne contre le coronavirus. Ils sont au feu". Pr Bengounia Abdelouahab, épidémiologiste au CHU Mustapha-Pacha, joint sa voix à celle du Pr Soukehal en rappelant que "la protection des professionnels de la santé est une obligation nationale. Outre la mort de Pr Si Ahmed, il y a eu aussi la mort d'un ambulancier, c'est dire que tous les employés des hôpitaux sont menacés. C'est aux pouvoirs publics d'assumer leurs responsabilités à les protéger", affirmera Pr Bengounia, qui ne manquera pas de témoigner sur le défunt : "Pr Si Ahmed, je l'ai connu en 1975 à la faculté de médecine, ensuite j'ai même travaillé avec lui à l'hôpital de Blida. C'est une personne qui était très attachée à son métier." De tels cris de détresse sous-entendent que les autorités sanitaires n'ont pas suffisamment anticipé pour pourvoir à temps "les soldats des hôpitaux" en moyens nécessaires de protection face à une telle maladie émergente foudroyante.