Les féminicides et les violences faites aux femmes sont en recrudescence depuis ces derniers mois en Algérie. Parmi les causes majeures de ce fléau, la promiscuité liée notamment à la crise sanitaire. Afin de cerner les raisons de cette subite augmentation, une enquête en ligne a été réalisée du 19 au 30 novembre auprès d'une vingtaine d'associations nationales, à la demande du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) Algérie. Dans une conférence virtuelle, l'avocate et militante des droits de la femme, Nadia Aït Zaï, a avancé des chiffres effarants qui témoignent de l'ampleur de ce phénomène durant la période de confinement. En effet, depuis le mois de mars, les associations ont catégorisé le type de violences par : psychologiques, physiques, socioéconomiques et agressions sexuelles. "Elles ont reçu pas moins de 9 818 signalements, soit 3 160 violences physiques, 3 117 violences psychologiques, 827 agressions sexuelles et 2 548 violences socioéconomiques", a informé l'avocate. Et d'expliquer : "Le confinement a fait que la famille vivait cloisonnée, alors le psychologique prédominait les violences." Concernant les plaintes recensées ces 9 derniers mois par les services de la police, elles sont estimées à 5 835 réparties en diverses catégories. "4 183 cas pour les violences physiques, 1 416 pour mauvais traitements, 80 pour violences sexuelles, 79 pour harcèlement de rue, 58 pour harcèlement sexuel, 25 pour homicides volontaires, 12 pour enlèvements et 7 pour coups et blessures." Et les premiers auteurs de ces violences sont l'époux, le frère, l'amant et le père. Le plus terrible est que ces chiffres sont loin de refléter la réalité, car ils concernent seulement le milieu citadin. Selon Nadia Aït Zaï, en comparant les données de la police et celles des associations, on note que "les femmes parlent aux associations, mais éprouvent des difficultés à déposer plainte, et préfèrent garder le silence, et ce, à cause de la peur, ainsi que des contraintes sociales et des obstacles auxquels elles sont confrontées, notamment l'absence de revenus et de logement". Mais la militante reste optimiste, car ces victimes sont de plus en plus nombreuses à affronter leurs bourreaux. D'ailleurs, après la levée du confinement, "beaucoup d'entre elles se sont rendues dans les tribunaux pour demander le divorce". Quant aux causes de ces violences, Nadia Aït Zaï a souligné qu'elles sont dues notamment au "désaccord persistant entre le couple, la perte de revenus, l'exiguïté du logement et l'augmentation des charges ménagères". Et de marteler : "C'est la situation économique qui a conduit à l'augmentation des violences. Les femmes ont été les plus agressées, atteintes et touchées durant cette pandémie. Nous devons réfléchir à une stratégie nationale pour pouvoir prendre en charge toutes ces femmes victimes de violences." Pour rappel, cette conférence s'est tenue dans le cadre de la clôture de la "Campagne des 16 jours d'activisme contre la violence basée sur le genre 2020", lancée par les Nations unies Algérie. Ce rapport présenté par Nadia Aït Zaï porte sur la "prise en charge des femmes et des filles victimes de violence basée sur le genre durant la pandémie de Covid-19". Cette enquête en ligne, première du genre dans le pays, avait pour objectif de "recueillir des données sur la continuité des services de prise en charge des femmes et des filles victimes de violence à travers les ONG" et, ainsi, d'être informé sur "l'ampleur des problèmes des cas recensés". À cet effet, la première démarche a été l'identification des associations (25 au total) qui, par la suite, ont reçu un questionnaire élaboré par l'UNFPA Algérie et d'autres agences onusiennes. Ces 18 questions mises en ligne avaient pour but de solliciter "des informations, des références et l'expérience des associations spécialisées sur les violences et la prise en charge des victimes et personnes en difficulté". Par ailleurs, cette étude "ne prétend pas être représentative de tout ce qui se passe, mais donne un aperçu sur le travail des associations". Le rapport sera finalisé la semaine prochaine. Hana M.