Le parquet a, en effet, annoncé avoir "ordonné au procureur de la République près le tribunal de Bir Mourad-Raïs d'instruire une enquête préliminaire sur les faits avancés par le citoyen Walid Nekkiche et chargé la police judiciaire compétente de cette mission". Eu égard à l'indignation soulevée auprès de l'opinion par les révélations du jeune étudiant, les réactions à l'annonce du parquet sont "prudentes", parfois "méfiantes". C'est le cas de Saïd Salhi, vice-président d'une aile de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (Laddh), qui note avoir pris "acte" et annonce que l'ONG "continuera à suivre de près ce dossier, jusqu'à ce que la vérité soit établie et que justice soit faite". Mais dans l'ensemble, l'ouverture de cette enquête est plutôt bien accueillie, malgré des réserves. Sur les réseaux sociaux, beaucoup rappellent qu'il s'agit là d'une première du genre, tandis que d'autres n'hésitent pas à soutenir que les autorités avaient déjà annoncé, par le passé, l'ouverture de plusieurs enquêtes, administratives ou judiciaires, mais dont les résultats sont restés pour la plupart dans les tiroirs. Et parfois jamais divulgués. C'est pour cela d'ailleurs, que l'avocat Abdelghani Badi, qui a enregistré une vidéo où il explique notamment les détails des sévices subis par Walid Nekkiche, évoque la nécessité de "constituer une commission d'enquête indépendante" pour élucider ce genre d'affaires car "il n'y a pas que Walid Nekkiche", selon lui. Le juriste raconte que plusieurs cas de torture sont signalés par des personnes arrêtées dans plusieurs régions du pays. Cela "touche toutes les catégories" et concerne "même les jeunes arrêtés pour trafic de drogue". D'après lui, les accusations concernent également tous "les corps de sécurité" et pense que "cela est devenu systématique pour certains agents". Mais "le plus inquiétant" est que "des plaintes ne sont pas enregistrées", a-t-il indiqué. D'ailleurs, les avocats de Walid Nekkiche ont déjà introduit une demande d'expertise médicale refusée par le parquet tout comme la plainte pour "tortures et sévices" corporels déposée en juillet 2020 et qui a été rejetée par le juge d'instruction. "Les faits remontant à 14 mois, il est probablement difficile de retrouver des traces", indique l'avocat. Beaucoup de détenus dénoncent régulièrement des cas de torture ou de maltraitance. Souvent, les concernés témoignent devant des juges lesquels n'en tiennent même pas compte. Pourtant, l'article 2 de la Convention mondiale contre la torture, paraphée par l'Algérie, oblige les responsables à "ouvrir obligatoirement une enquête" dès que l'information portant sur des actes de torture "leur parvient". Mais cela se fait très rarement, dénoncent souvent les avocats et défenseurs des droits de l'Homme. Pour éviter de tels cas, des avocats et activistes préparent la constitution d'un comité national contre la torture et les maltraitances. L'annonce interviendra dans les prochains jours, apprend-on de différentes sources.