Nos amis responsables du Festival international du film de Rennes (France) ont décidé, pour sa prochaine édition en mars 2006, de le célébrer à Alger. Nous nous en réjouissons car nous attendions cette programmation depuis fort longtemps. Longs et courts métrages, documentaires ou fiction, les films chantant Alger sont très nombreux. À l'instar de Rome, Paris, New York ou Le Caire, Alger a toujours attiré les cinéastes qui l'ont beaucoup aimée et l'ont fréquentée assidûment. Depuis la naissance du cinéma, il y a plus d'un siècle avec les frères Lumière, à ce jour, des cinéastes en grand nombre, nationaux ou étrangers, ont filmé avec amour la Cité de lumière, ce grand amphithéâtre surplombant une baie splendide. Des centaines de films permettent de découvrir et d'apprendre à connaître cette ville, de suivre son évolution et son développement. L'attrait irrésistible de son architecture, avec ses innombrables et pittoresques escaliers, n'a pas échappé aux élèves de l'ex-Institut du cinéma de Ben Aknoun, qui avaient tous choisi, comme projet de fin d'étude, de réaliser un film sur leur ville : Merzak Allouache avec Le voleur, Farouk Beloufa avec Situation de transition, Rabah Laradji avec La poupée et Toufik Sebia avec Un après-midi. Ce dernier court métrage, d'à peine 8 minutes, symbolise toute la magie que dégage Alger. L'histoire se passe en 1965. Nous voyons une jeune femme, brune et belle, sortir d'une maison située sur les hauteurs de La Casbah, habillée de façon traditionnelle algéroise : voile (haïk m'rema) et voilette. D'une main, elle traîne un enfant et de l'autre, elle porte un sac. Après avoir descendu quelques marches d'une ruelle, elle entre dans une autre maison où elle confie l'enfant à une amie. Quelques marches plus bas, elle entre dans une autre maison où elle se débarrasse de son voile et de sa voilette. Elle en ressort vêtue d'un tailleur strict (marqua), cheveux courts au vent, et elle prend le chemin de la piscine du Ridja, celle des étudiants, au port d'Alger. Après un rapide passage dans une cabine, elle réapparaît, toute bronzée, dans un bikini à la Ursula Andress, se dirige vers l'eau et fait un plongeon impeccable. Aujourd'hui, il nous arrive encore de nous demander pourquoi la magnifique interprète de ce rôle, Leïla Boutaleb, a abandonné le beau métier d'actrice. Si nous avons choisi de parler de ce petit film de Sebia, silencieux et sans aucun commentaire, c'est parce qu'il rend à la perfection l'architecture de la vieille ville, son atmosphère troublante et l'audace de ses enfants. Nos amis programmateurs du festival n'auront que l'embarras du choix pour rassembler les films. Plusieurs pistes s'offrent à eux : films inscrivant Alger dans leur titre, Alger pendant la guerre, Alger durant la période coloniale, Alger aujourd'hui, etc. Cependant, nous nous interrogeons sur le fait que les réalisateurs n'ont jamais placé leur caméra sur l'autre versant de la ville, dans les quartiers “bidonvillisés”, moches et déglingués. Nous voulons croire que c'est par amour pour la ville blanche. Outre le cinéma, l'hommage à Alger pourraÎt rassembler d'autres disciplines afin de donner plus de chaleur et de profondeur à l'événement. En effet, comment parler d'Alger sans le chaâbi et son carré magique constitué par les quatre grands maîtres : El Anka, Mrizek, Ezzahi, Guerrouabi. Cette musique enchanterait la manifestation dédiée à El Bahdja. Bien entendu, une place serait faite à El Assima, magnifique chanson de Abdelmadjid Meskoud. Par ailleurs, une exposition photo, en hommage au Mouloudia, depuis sa fondation jusqu'à 1954, serait également la bienvenue. B. K. [email protected]