Judo / Open Africain d'Alger : large domination des judokas algériens    Chargé par le président de la République, M. Rebiga participe à Managua à la cérémonie d'investiture du Commandant en chef de l'Armée du Nicaragua    Athlétisme / Meeting en salle de l'Arkansas - 400m : nouveau record d'Algérie pour Mouatez Sikiou en 46:46"    Oran: ouverture de la 2e édition du Salon du commerce électronique et des services en ligne    Le RND salue les réalisations économiques et sociales de l'Algérie nouvelle    Transport aérien: Sayoud met en avant les efforts pour le renforcement de la sécurité de l'aviation civile    Le président de la République procède à l'inauguration de l'usine de dessalement de l'eau de mer "Fouka 2" dans la wilaya de Tipasa    Foot/ Ligue 1 Mobilis (17e J) PAC-MCA : le "Doyen" pour creuser l'écart en tête    Statut particulier du secteur de l'Education: réception des propositions de 28 organisations syndicales    La Protection civile organise à Djanet une manœuvre en milieux sahariens périlleux    Pluies orageuses sur plusieurs wilayas à partir de samedi soir    Bataille de Foughala à Batna: le jour où la bravoure des moudjahidine a brisé le siège de l'armée française    L'ONU exprime sa préoccupation face à la poursuite de l'agression sioniste en Cisjordanie occupée    Boughali reçu au Caire par le président du Parlement arabe    Rebiga à Managua pour participer à la cérémonie d'installation du Commandant en chef de l'Armée et du Commandant général de la police du Nicaragua    Cisjordanie occupée: l'agression sioniste contre la ville de Jénine et son camp se poursuit pour le 33e jour consécutif    RDC : Le groupe terroriste M23 fait obstacle aux aides humanitaires    Loin de ses potentialités, l'Afrique doit améliorer sa gouvernance    Un portail électronique pour prendre en charge les requêtes des citoyens    Les candidats appelés à respecter l'éthique des pratiques politiques    Football : Clôture de la formation de la licence CAF A pour les anciens internationaux    MCA – Orlando Pirates d'Afrique du Sud aux quarts de finale    Coupe du monde 2026-Qualif's : Botswana-Algérie le 21 mars à 15h    Un Bastion de l'Élite    Campagne de sensibilisation destinée aux femmes rurales    Les colons profanent la Mosquée Al-Aqsa    Arrestation de trois narcotrafiquants    Saisie de 100 g de cannabis et une quantité de psychotropes à Oued Rhiou    Assurer un diagnostic précoce    L'occupation marocaine empêche trois euro-députés d'entrer dans la ville sahraouie occupée    Rencontre scientifique avec des experts de l'Unesco    Installation des commissions    L'écrivain Yasmina Khadra remercie le président de la République pour ses félicitations    Journée nationale de la Casbah: activités artistiques et expositions en février à Alger    Réception de la majorité des projets de réhabilitation de la Casbah "fin 2025 et en 2026"    «La justice sera intransigeante contre tout abus !»        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Femmes en péril
Retour sur les conditions de travail des enseignants à Bordj Badji-Mokhtar
Publié dans Liberté le 22 - 05 - 2021

C'est une autre blessure qui s'ouvre dans le corps des femmes. L'insupportable agression dont ont été victimes les neufs enseignantes de Bordj Badji-Moukhtar est un crime de trop. Il interpelle profondément les consciences et appelle une mobilisation générale. Etat et société.
L'agression des enseignantes dans leur logement collectif de fonction a levé le voile sur le climat hostile dans lequel se débat la communauté éducative à Bordj Badji-Mokhtar pour s'acquitter de sa mission dans cette région de l'extrême sud du pays.
Des enseignants, joints par téléphone et sur les réseaux sociaux, ont accepté de raconter une tranche de leur vie dans ces écoles dépourvues d'un minimum de moyens, avec des effectifs allant de 700 à 1 100 élèves, selon les chiffres fournis par le président du Syndicat algérien des travailleurs de l'éducation (Sate) à Adrar, Ghaffour Ben Slimane. "Il est inadmissible qu'il n'y ait pas de police ici pour assurer la sécurité des gens", dénonce-t-il, notant qu'"un commissariat a été construit en ville, mais il n'a toujours pas ouvert".
Le quotidien des enseignants évoluant à Bordj Badji-Mokhtar, fait d'insécurité tout au long de l'année, est aussi fait de conditions de travail, de transport et d'hébergement extrêmement difficiles, comme en témoignent certains enseignants qui ont requis l'anonymat, par crainte d'autres violences. "Bordj Badji-Mokhtar est une forêt sauvage mais sans arbre", lâche comme une sentence Ahmed, appelons-le ainsi car il n'est pas évident pour cet enseignant dans une école primaire au chef-lieu de BBM, de dévoiler son vrai nom, pour d'évidentes raisons de sécurité.
Il n'hésite d'ailleurs pas à dénoncer ce qu'il considère comme une ségrégation contre ses collègues originaires d'autres régions. "Nous vivons ici sous la Clémence de Dieu", ajoute-t-il expliquant qu'aux pressions de l'administration locale "qui nous accuse de semer la zizanie" avec nos revendications, "nous faisons aussi face aux menaces et aux propos peu amènes des gens d'ici sur les réseaux sociaux et dans la rue pour avoir fait éclater cette affaire d'agression et de viol de nos collègues enseignantes".
Autrement dit, "nous sommes les derniers à ne pas avoir encore quitté BBM, mais nous le ferons dans l'après-midi, même si nous avons notre billet d'avion pour dimanche", explique un enseignant-syndicaliste du Sate par téléphone, pressant ses collègues de faire leurs valises, avant de prendre un taxi clandestin pour Adrar. "Ici, il n'y a pas de transport de voyageurs parce que tout simplement il n'y a pas de route. Nous voyageons donc à bord de 4X4 pour 7 000 DA entre BBM et Adrar", souligne Farès.
Entassés parfois à 13 dans des appartements de 70 mètres carrés et aux murs nus, les quelque 500 enseignants travaillant à Bordj Badji-Mokhtar affirment vivre l'enfer. "Même si tu as les moyens de t'acheter un climatiseur, il ne fonctionnera pas à cause des coupures d'électricité ou du courant de faible intensité", explique Nouria, qui dit chercher parfois de l'eau dans des bidons pour cuisiner ou faire sa toilette.
"Pour boire, il faut acheter de l'eau minérale qui coûte entre 50 et 120 DA" en ville, alors que son prix atteint les 300 DA dans certaines zones éloignées "surtout si elle est conservée dans un congélateur", appuie Lamine, qui dit attendre avec impatience de boucler ses trois ans avant de prétendre à une mutation dans un autre établissement à Adrar ou rentrer carrément dans sa ville natale au nord du pays.
Laver ses vêtements, un luxe
"J'utilise de l'eau minérale pour faire mes besoins", regrette Sofiane. Interrogé sur comment il se débrouille pour laver son linge, il se contente d'un rire amer, non sans omettre de préciser que "laver ses vêtements est un luxe ici".
Evoquant la cherté de la vie, Sofiane parle des prix des légumes au-dessus des 150 DA et de fruits dont les prix ne baissent pas en dessous des 500 DA.
"Je ne me permets même pas de demander le prix des fruits tellement ils sont chers", commente-t-il. "Je suis diplômé et je n'ai pas d'autre choix pour gagner ma vie", explique-t-il, lui qui passe parfois ses vacances scolaires loin des siens.
"Je n'ai pas les moyens de rentrer chez moi à chaque vacance scolaire. Le billet d'avion coûte très cher et il faut réserver un mois à l'avance pour espérer trouver une place dans un ATR", poursuit-il. "L'an dernier, 18 enseignantes ont été obligées de partager trois chambres", insiste, pour sa part, Mohamed, se rappelant avoir été hébergé par des connaissances originaires comme lui d'Adrar et exerçant comme commerçants dans la ville de Bordj Badji-Mokhtar. "Avant la construction de quelques logements de fonction, tu dois trouver une location ou aller chez des gens de ta région pour te dépanner", affirme cet enseignant d'arabe au lycée.
Pis encore, des logements ne sont même pas raccordés aux réseaux d'évacuation des eaux usées. "Il y a deux ans, des voyous à bord d'une moto m'ont volé mon sac, près de chez moi", raconte Houda, enseignante d'anglais au moyen et originaire d'Adrar, qui a dû refaire tous ses papiers d'identité et s'acheter un nouveau téléphone. Certaines de ses collègues, hébergées et travaillant dans le même établissement, rapportent en classe tout ce qui peut avoir de la valeur, après les vols commis dans leurs logements de fonction, dépourvus de barreaux et sans agent de sécurité.
"D'ordinaire, les classes avaient entre 38 et 40 élèves et c'était déjà difficile à gérer. S'il vous venait à l'idée de renvoyer un élève pour une raison ou une autre, vous risquiez d'être agressé dans la rue facilement", note Saïd (dont le nom a également été changé), tout en se remémorant l'agression d'un de ses collègues par une trentaine de personnes pour avoir renvoyé un élève qui s'était mal comporté durant son cours, il y a deux ans. "Il a échappé à leur lynchage grâce à un commerçant d'Adrar venu à son aide en le cachant dans son magasin", se rappelle-t-il, dénonçant, comme ses autres collègues, le laxisme et les promesses non tenues des responsables locaux quant au fait de leur assurer un minimum de sécurité à l'intérieur de leurs écoles et logements, ouverts aux quatre vents.
Avec les mesures sanitaires pour lutter contre la propagation du coronavirus et ayant imposé l'enseignement avec le système des groupes, "nous nous sommes retrouvés avec des groupes de 68 à 70 élèves", revient à la charge un syndicaliste, expliquant cette situation par le manque d'infrastructures éducatives à Bordj Badji-Mokhtar, tous paliers confondus.
Aujourd'hui, la situation est plus qu'intenable, disent-ils, à la veille d'un grand rassemblement devant le siège de la wilaya d'Adrar, prévu pour demain dimanche, à la suite de l'agression des neuf enseignantes à BBM, dont l'affaire n'est pas loin de calmer leur colère latente depuis des années.

Lyès MENACER


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.