La journaliste de Radio M, Kenza Khatto, a finalement été condamnée, hier, à trois mois de prison avec sursis et à une amende de 20 000 DA, par le tribunal de Sidi M'hamed d'Alger a-t-on appris de l'intéressée. "J'ai été innocentée de l'accusation d'atteinte à l'unité nationale, d'attroupement non armé, d'incitation à attroupement et de publications facebook susceptibles d'attenter à l'intérêt national. La justice m'a condamnée à trois mois de prison avec sursis et à une amende de 20 000 DA pour outrage à corps constitués", a écrit la journaliste sur son compte facebook. "Je suis libre aujourd'hui et je vais continuer à exercer mon métier que j'aime plus que tout", ajoute-t-elle. Selon Me Zoubida Assoul, un seul chef d'inculpation a été retenu contre elle : il s'agit d'"atteinte à corps constitués". "Or, il n'y a aucun élément constitutif de cette accusation dans le dossier", observe Me Assoul. Lors de son procès qui a eu lieu le 25 mai dernier, le parquet avait requis un an de prison ferme. Après quatre jours de garde à vue, elle avait été remise en liberté provisoire le 17 mai, après sa comparution immédiate décidée par le procureur près le tribunal de Sidi M'hamed. Lors de l'audience du 17 mai, Kenza Khatto s'était brutalement évanouie alors qu'elle parlait au juge, épuisée par les jours passés en garde à vue. Elle avait été interrogée sur des sujets directement liés à son métier de journaliste au sein de Radio M, dont le directeur El-Kadi Ihsane avait été placé le jour même sous contrôle judiciaire, suite à une plainte déposée par le ministère de la Communication après un article publié sur le site du même média. Arrêtée lors de la marche du 14 mai violemment réprimée par les forces de sécurité, Kenza Khatto figurait parmi une douzaine d'autres confrères arrêtés le même jour et des dizaines de manifestants, dont plusieurs ont été condamnés à de lourdes peines de prison, tandis que d'autres sont toujours en attente de leur procès. Ses avocats disposent de dix jours pour introduire un appel. Dans le même contexte, la chambre d'accusation près la cour d'Alger examinera, le 6 juin, le dossier d'El-Kadi Ihsane, le directeur de Radio M et de Maghreb Emergent. Placé sous contrôle judiciaire très restrictif, sommé de se présenter tous les lundis à 10h au commissariat de police, son passeport confisqué, il est interdit de quitter le territoire national. El-Kadi Ihsane s'est vu aussi interdit de sortie des limites de la wilaya d'Alger, sans autorisation. Il est poursuivi pour "diffusion de fausses informations à même de porter atteinte à l'unité nationale", "perturbations des élections législatives anticipées du 12 juin" boycottées par les partis progressistes de l'opposition et une majorité d'Algériens impliqués dans la révolution populaire du 22 Février 2019. Le journaliste est aussi accusé de l'"ouverture de la plaie de la tragédie des années 90" et de la "réouverture du dossier de la tragédie nationale (tiré de la loi sur la réconciliation nationale)", selon son collectif de défense qui, tout comme le parquet, a fait appel de l'ordonnance du juge d'instruction le plaçant sous contrôle judiciaire.