La question irakienne divise les puissances occidentales. Washington et Londres font face à l'opposition franco-allemande à des frappes militaires contre Bagdad. “Rien ne justifie de rompre le fil des inspections pour entrer dans le temps de la guerre et de l'incertitude”, a clamé haut et fort, au Conseil de sécurité de l'ONU, le chef de la diplomatie française. La réunion des ministres des Affaires étrangères des quinze pays membres du Conseil de sécurité, qui devait être consacrée essentiellement à la lutte antiterroriste, a, en fin de compte, été dominée par l'Irak. Soutenu par son homologue allemand , Joschka Fischer, qui a fait part de la ferme opposition de son pays à un conflit avec l'Irak, et par le représentant chinois, Dominique de Villepin a battu en brèche la position des Etats-Unis et de la grande-Bretagne. Fidèles à leur politique, Washington et Londres ont minimisé l'importance de l'accord conclu par les dirigeants irakiens et les experts de l'ONU, portant l'engagement de Bagdad à coopérer davantage dans les inspections. Ils continuent de masser leurs troupes et leurs matériels de guerre aux frontières de l'Irak. Selon Colin Powell et Jack Straw, le régime de Saddam Hussein ne donne aucun signe sérieux de coopération. Ils affirment que le processus diplomatique touche à sa fin. Les deux diplomates s'arrogent le droit, comme d'habitude, de parler au nom de l'ONU en disant que celle-ci ne va plus se permettre de rester “impuissante” face au “refus irakien de coopérer”. “Le temps de la patience touche à sa fin”, a déclaré Jack Straw. La Maison-Blanche et Doxing Street attendent “des actes concrets et non des paroles”. “Seules les actions nous intéressent, après onze ou douze ans passés à voir Saddam Hussein faire des promesses sans les tenir”, a affirmé Ari Fleisher, le porte-parole de l'Administration Bush. L'impatience américano-britannique s'est heurtée à un rejet catégorique de plusieurs membres du Conseil de sécurité, qui estiment qu'il faut laisser le temps nécessaire aux inspecteurs onusiens de finir leur travail, du moment que le régime irakien se déclare disposé à faciliter le déroulement des inspections. Hans Blix et Mohamed El-Baradei, les deux responsables des opérations de contrôle, estiment eux aussi qu'il faut encore du temps pour “réunir toutes les preuves”, car jusqu'à maintenant “il n'y a pas assez de preuves pour affirmer au Conseil que nous pouvons clore le dossier”. Il est clair que la tension monte avant la réunion du Conseil de sécurité, laquelle sera consacrée au rapport sur les inspections menées jusque-là en Irak que présenteront le directeur général de l'agence internationale de l'énergie atomique et le chef des inspecteurs. Selon le ministre chinois des affaires étrangères, ce rapport “ne met pas un point final” et doit être “un nouveau départ” pour les inspections. Cette déclaration vient tempérer l'ardeur des américains et des britanniques, dont les préparatifs de guerre sont à un stade très avancé. Faudrait-il que Bush et Blair prennent en considération les voix opposées à l'usage de la force contre l'Irak ? K. A. 30% des Britanniques seulement soutiennent la guerre Le soutien des Britanniques à une guerre en Irak est tombé à son plus bas niveau, à seulement 30%, selon un sondage publié hier par le quotidien britannique Guardian. Seules 30% des personnes interrogées affirment qu'elles approuveraient une guerre, soit six points de moins que dans une enquête similaire il y a quatre semaines et le plus bas niveau de soutien depuis que l'institut de sondage ICM a commencé ses enquêtes sur cette question en août. En revanche, 47% se déclarent opposés à une guerre, soit une hausse de trois points sur la même période. Seuls 10% des Britanniques soutiendraient une action militaire contre l'Irak lancée sans l'accord des Nations unies, ajoute le sondage. Malgré les assurances répétées du gouvernement britannique selon lesquelles une nouvelle résolution du Conseil de sécurité ne serait pas nécessaire pour engager un conflit en Irak, 81% des personnes interrogées indiquent qu'elles sont opposées au recours à la force sans nouveau mandat de l'Onu. Le sondage a été réalisé par ICM sur un échantillon de 1 1002 adultes entre le 17 et le 19 janvier.