Réunis en sommet extraordinaire, ils cherchent à trouver un moyen d'éviter la confrontation. Par une coïncidence du calendrier, Arabes et Européens se réunissent en Sommet qui, au Caire, qui à Bruxelles, afin de trouver un moyen d'empêcher un embrasement dans le Golfe qui détruira tous les efforts fournis par la communauté internationale, ces dernières années, pour instaurer la paix entre les peuples. Les possibilités de désarmer l'Irak par des moyens pacifiques sont loin d'être épuisés, mais il faut, sans doute, convenir qu'une telle issue n'entre point dans la stratégie de Washington de conforter son emprise sur la région. Au Caire, les Arabes, quoique divisés, essaient néanmoins, de présenter un semblant de front uni contre une éventuelle frappe contre l'Irak. A la vérité l'exercice est hasardeux et difficile d'autant que nombre de pays arabes, outre qu'ils se réjouiraient de la chute du maître de Bagdad, se trouvent quasiment en situation d'occupation par l'armée américaine installée à domicile notamment au Koweït, à Bahreïn, au Qatar et aux Emirats, de même qu'un nombre appréciable de soldats américains stationnent en Arabie saoudite. Dans ces conditions, rien moins que favorables, le rôle que les Arabes peuvent jouer dans une solution pacifique du contentieux irakien, si toutefois ils en ont réellement l'ambition, est des plus limités. De fait, la discrétion des dirigeants arabes face aux menaces de guerre américaines a tôt fait de les disqualifier dans la recherche d'un consensus international pour éviter la confrontation et épargner au peuple irakien les affres de la guerre. Aussi, le ministre libanais des Affaires étrangères, Mahmoud Hamoud, président en exercice du Conseil ministériel arabe, a beau jeu de réitérer l'opposition arabe à la guerre projetée par les Etats-Unis. M.Hamoud indique dans sa déclaration d'ouverture de la réunion extraordinaire des ministres arabes des Affaires étrangères: «Nous proclamons notre refus clair d'une guerre contre l'Irak et soulignons la nécessité de favoriser un règlement pacifique» avant d'ajouter «Nous assurons que les pays arabes s'abstiendront de fournir toute forme d'assistance à une action militaire contre l'Irak». Ce qui revient à parler pour ne rien dire si l'on considère que l'armada américaine forte de cinq porte-avions, de moyens matériels gigantesques, en sus des 150.000 hommes se trouvant déjà sur place, dans des pays qui ne peuvent opposer aucun refus à Washington. Notons que la réunion n'a pas fixé de date pour le sommet, mais selon Ahmed Maher, chef de la diplomatie égyptienne: «Il y a consensus pour tenir un sommet extraordinaire le 28 février» indiquant cependant que «cette question sera tranchée dans les prochaines 48 heures». De fait, la réunion des ministres arabes sortait quelque peu de l'ordinaire par la participation à cette réunion d'observateurs européens que sont le ministre grec des Affaires étrangères, Georges Papandréou, président en exercice du Conseil ministériel de l'UE et Chris Patten, Commissaire européen. Cette présence «reflète le souci des pays arabes de se concerter avec l'UE» assure un responsable de la Ligue arabe sous le couvert de l'anonymat. Une Union européenne qui, en effet, essaie de son côté de minimiser les dégâts dans ses rangs avec la division consécutive aux prises de position opposées entre les partisans de la guerre sous la bannière US et ceux qui sont contre. Aussi, le sommet des Quinze qui devait s'ouvrir, hier en fin de matinée, sera-t-il crucial pour la cohésion d'une UE qui se découvre sans politique étrangère dynamique et sans réelle perspective de peser sur le devenir des évènements futurs. Sans la fermeté dont font montre la France, membre permanent du Conseil de sécurité, Paris se disant prête à user de son droit de veto en cas de besoin, et l'Allemagne, clé de voûte de l'Union européenne, il ne fait pas de doute que l'Europe aurait été entraînée dans les velléités guerrières américaines. Mais cette résistance du duo franco-allemand à une guerre que, affirment Français et Allemands, rien ne justifie, a laissé des traces avec des clivages apparents entre les deux camps. Il ne fait pas de doute que la cohésion de l'UE va s'en ressentir grandement dans la construction de la Grande Europe. Un aperçu en est donné par le compromis boiteux auquel est parvenu l'OTAN, -dans la perspective de la défense de la Turquie dans l'éventualité d'une guerre-, l'Alliance atlantique en sortant, quoique qu'en disent les commentateurs, plus affaiblie que jamais. Face à une Amérique surpuissante et déterminée à assurer son empire sur le monde, les Européens divisés, les Arabes inexistants, et sans grands moyens militaires et politiques, ne semblent pas peser lourd.