Leurs habitations brûlées, beaucoup de sinistrés sont contraints de se réfugier dans les cités universitaires de Tizi Ouzou ou encore dans des maisons de jeunes. Le passage destructeur des feux laisse, une semaine après ce drame, une Kabylie en cendres et ses populations dans un désarroi indescriptible. Beaucoup de familles sinistrées sont sans toit. Leurs habitations brûlées, elles sont contraintes de les abandonner pour se réfugier dans les cités universitaires de Tizi Ouzou ou encore dans des maisons de jeunes. C'est le cas de neuf familles d'Aïn El-Hammam évacuées en urgence, logées dans l'auberge de la même localité. Leur vie a brusquement basculé dans l'incertain d'autant que les populations n'étaient pas toutes informées de cette opération d'évacuation. Hébergées dans cette auberge depuis le jour où les incendies ont ravagé leurs villages, le 10 août dernier, ces familles vivent, depuis, silencieusement dans la douleur et le manque d'aide. Ayant perdu maisons, effets personnels et même des membres de leurs familles dans les incendies qui, nous a-t-on expliqué sur place, ont atteint les villages d'Azrou Kollal, d'Aït Aïlem, de Tamkenfoust, ces familles n'ont, pour la plupart d'entre elles, plus où aller et, par conséquent, peuvent probablement séjourner encore longtemps dans cette auberge relevant de la Direction de la jeunesse et des sports. Après une dizaine de jours passés à l'ombre du grandiose élan de solidarité nationale qui s'est mis en branle d'instinct en faveur des villages les plus sinistrés et dont le drame a été aussitôt mis sous le feu des projecteurs, voilà que ces familles bénéficient désormais d'une attention particulière, et ce, suite à un incident qui a révélé leur drame au grand jour. Cela s'est passé samedi soir lorsqu'un groupe de personnes a envahi l'auberge pour tenter de s'emparer du peu d'aides qui y ont été déposées. Selon d'autres versions, ce sont juste des jeunes ayant pour habitude d'utiliser les lieux pour leurs activités culturelles qui sont venus se réapproprier l'endroit. En tout cas, comme à quelque chose malheur est bon, l'alerte donnée pour venir les protéger n'a pas manqué d'attirer les regards des bienfaiteurs sur leur situation. Aussitôt, des habitants d'Ikhlidjen, le village le plus meurtri par les incendies qui ont quasiment décimé plusieurs familles, montrent l'exemple en leur acheminant une partie des aides reçues. Le lendemain, c'est un autre groupe de bénévoles de la ville de Tizi Ouzou qui vient à leur chevet. Mais à l'entrée de l'auberge, une note affichée après l'incident de samedi indique que sur instruction de la Direction de la jeunesse et des sports, les aides sont désormais interdites d'accès. Sur place, on nous explique que de toute manière, faute de moyens pour cuisiner sur place, les aides ne sont pas d'une grande utilité. "Comme un malheur ne vient jamais seul, ces victimes des incendies comptent également parmi elles des cas positifs à la Covid-19. Ces personnes sont confinées dans leur chambre et ce n'est pas prudent que l'on vienne leur rendre visite", nous explique-t-on. Fort heureusement, un bienfaiteur a pris l'initiative, depuis leur arrivée dans cette auberge, de les prendre en charge au plan restauration. Lui, c'est Mokrane Lattar, un jeune de la région qui se démène chaque jour, avec la contribution des membres de sa famille, à leur assurer quotidiennement le petit-déjeuner, le déjeuner et le dîner. "Au lendemain des incendies, j'ai appris par hasard que des familles avaient été évacuées à l'auberge. Je me suis donc rendu sur place et j'ai vu qu'il n'y avait personne pour s'occuper d'elles. Leur situation ne pouvait me laisser indifférent. Revenu complètement bouleversé, j'ai décidé de leur venir en aide comme je pouvais. C'est pour moi un devoir", nous explique, d'emblée, Mokrane que nous avons rencontré chez lui au moment où il préparait la livraison du dîner pour ces familles. "La préparation de ces repas est assurée par mes sœurs, ma mère et les autres membres de ma famille qui se mobilisent quotidiennement pour cette œuvre humanitaire. Une de mes sœurs est mariée dans la région et l'autre est infirmière à l'hôpital d'Azazga, mais elles répondent toujours présent", nous dit-il. Outre ces familles, Mokrane assurait, jusqu'à leur départ samedi, des repas aux agents Sonelgaz dépêchés de Blida et hébergés dans cette même auberge pour prendre en charge la réhabilitation du réseau électrique détruit par les flammes. "Je livre quotidiennement une cinquantaine de repas à midi et environ 80 le soir", précise-t-il. Depuis hier, plusieurs bienfaiteurs ont repris leur bâton de pèlerin pour acheminer des denrées et même des vêtements au domicile de ce volontaire hors pair qui ne compte pas arrêter son œuvre de bienfaisance au profit de ces familles. Cependant, à Larbâa Nath Irathen où il est toujours fréquent de voir des convois de véhicules - immatriculés dans différentes wilayas du pays - chargés de denrées, de médicaments, de groupes électrogènes..., se rendre dans les villages sinistrés où les autorités, soutiennent de nombreux habitants rencontrés, se contentent pour le moment de poursuivre le recensement des dégâts.