“Aucun émissaire n'est venu à Tizi Ouzou” “Nous n'avons rencontré aucun émissaire du pouvoir, ni quelqu'un d'autre. Personne ne nous a contactés.” C'est ce que nous a déclaré, hier, M. Berdous Kaci, membre de la CADC. Rappelons que la dernière fois où des cercles du pouvoir ont dépêché des “envoyés spéciaux” en Kabylie pour tenter de dialoguer avec des délégués remonte à juin 2002. Les tractations ont eu lieu à la prison de Tizi Ouzou. L'émissaire, manifestement mandaté par ses supérieurs, avait demandé aux prisonniers de rédiger une déclaration pour préparer la CADC à accepter la proposition de dialogue. Deux jours après cette visite, les délégués détenus se sont réunis dans la salle 4 avec l'autorisation de la direction pénitentiaire. L'offre avait été rejetée à l'unanimité. A. T. CICB : “Il n'y a pas eu de contact” Des délégués de la CICB les plus en vue du mouvement citoyen de Kabylie, dont certains sont des ex-détenus, ont tenu à démentir formellement tout contact avec les émissaires du pouvoir, actuellement dans la région. “À aucun moment, je n'ai eu des contacts avec des émissaires du pouvoir”, a déclaré hier Oudjedi Farès, délégué de la CICB, de l'Interwilayas et ex-détenu. Notre interlocuteur s'interroge : “À quoi riment les déclarations de ces soi-disant émissaires du pouvoir ?” “Il y a des gens qui veulent brouiller l'environnement politique à l'approche de l'échéance présidentielle de 2004”, a-t-il ajouté, tout en soutenant qu'“à chaque fois qu'il y a des enjeux politiques, il y a inévitablement des interférences”. L'autre délégué, également codétenu, de Sidi-Aïch, Bezza Benmansour, abonde dans le même sens. “La libération immédiate et inconditionnelle des détenus et l'engagement du pouvoir à satisfaire la plate-forme d'El-Kseur demeurent des préalables immuables de notre mouvement”, déclare-t-il, avant d'affirmer avec force qu'il n'a pas été approché par ces émissaires “mystérieux” du pouvoir “réel”, puisque c'est ainsi qu'ils se présentent. Ce délégué estime qu'“il ne saurait y avoir de dialogue que pour la mise en œuvre de la plate-forme d'El-Kseur”. Le harcèlement policier, les manipulations et autres diversions n'entameront pas d'un iota “notre conviction à aller au bout de nos revendications”. De son côté, le délégué d'Akbou, Zahir Benkhellat, lance carrément un défi : “Que ces émissaires du pouvoir rendent publiquement les noms des délégués qu'ils auraient rencontrés !” “Nous militons pour l'édification d'un Etat de droit, et aucune compromission n'est possible avec ce pouvoir qui excelle dans l'art de la division, mais aussi méprise la société”, souligne Benkhellat. Sofiane Adjelane, délégué aussi de la commune d'Akbou, soutient qu'il n'a été contacté par aucun de ces émissaires. Boudjemaâ Agraw, délégué de la commune de Béjaïa et sous contrôle judiciaire actuellement, affirme qu'il n'a jamais reçu d'émissaires du pouvoir en vue d'amorcer un dialogue avec ce dernier. Yazid M'hidi se demande, de son côté, à quoi obéit cette campagne d'“intox” tout en soutenant qu'effectivement il y a eu des tractations dans les coulisses avec des gens de Béjaïa qui “s'autoproclament délégués du mouvement”. Le porte-parole de la société civile de la commune d'El-Kseur, Ali Gherbi, contacté par nos soins avant-hier, déclare qu'“il n'a eu de contact avec aucun émissaire du pouvoir”. L'ex-détenu et délégué d'El-Kseur tient même à mettre en garde ces émissaires, s'ils existent, de tenter de l'approcher “au risque d'être lynchés par la population”. Avec qui ces émissaires déclarés du “pouvoir réel” ont-il pris langue alors ? La question reste posée. L. Oubira