L'Iran vient de recevoir, avec le report de la visite du secrétaire général des Nations unies, l'avertissement le plus clair contre le risque d'un retour à l'isolement international que le durcissement du régime et l'antisionisme de son président lui font courir. La République islamique affirme avoir pris l'initiative de faire ajourner, sine die, la visite significative que devait effectuer Kofi Annan du 11 au 13 du mois en cours. C'est le ministère iranien des Affaires étrangères qui est intervenu auprès du bureau des Nations unies à Téhéran “pour qu'il demande à Kofi Annan d'entreprendre son voyage à un moment plus approprié”, a assuré l'agence officielle Irna, citant une “source informée” au sein de ce ministère. Les Nations unies, elles, ont indiqué, diplomatiquement, que la décision avait été prise d'un commun accord avec l'Iran. Mais le porte-parole de Kofi Annan, Stéphane Dujarric, a clairement signifié que le secrétaire général avait été convaincu d'annuler son étape entre l'Arabie saoudite et la Tunisie par la radicalisation observée depuis l'accession de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence en août dernier. “Compte tenu de la controverse actuelle, il aurait été difficile à M. Annan de faire des progrès sur les thèmes qu'il souhaitait aborder avec les autorités iraniennes”, a dit M. Dujarric. Le porte-parole n'a pas précisé quelle “controverse” il invoquait. Mais, même si l'informateur d'Irna a démenti tout lien, il ne fait guère de doute que M. Dujarric se référait au récent appel de M. Ahmadinejad à “rayer Israël de la carte” et au tollé qu'il a suscité. Pressé par les adversaires de la République islamique de renoncer à passer par l'Iran, M. Annan avait d'abord maintenu sa visite, dont les préparatifs étaient avancés. Il avait fait savoir qu'il entendait précisément placer en haut de l'ordre du jour les efforts de paix entre Palestiniens et Israéliens. Mais il n'aurait pas manqué d'autres sujets de conversation avec M. Ahmadinejad, qu'il devait rencontrer : le nucléaire, le terrorisme, les droits de l'Homme… etc. Or, dans ces domaines, les prises de position de M. Ahmadinejad n'ont fait qu'ajouter aux inquiétudes de la communauté internationale. Les propos de M. Ahmadinejad sur Israël ont valu à l'Iran la condamnation du Conseil de sécurité de l'Onu. Le 24 novembre, l'Agence internationale de l'énergie atomique pourrait avoir à décider de la nécessité de saisir ou non ce même Conseil de sécurité parce que l'Iran n'aurait pas fourni les garanties qu'il ne cherche pas à se doter de l'arme nucléaire. L'Iran a repris partiellement des activités nucléaires ultra-sensibles en même temps que M. Ahmadinejad s'installait à la présidence. S'il vient de donner aux inspecteurs de l'Aiea l'accès qu'il refusait jusqu'alors au site de Parchine, il entend aussi dans les prochains jours mener plus avant la conversion d'uranium.