Déjà éprouvés par les conséquences de la pandémie, les Algériens font face depuis quelques jours à une rareté de certains produits de consommation. Face aux interrogations des citoyens, le Sénat a décidé d'ouvrir une enquête parlementaire. Le Conseil de la nation a annoncé, hier, la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les pénuries qui ont touché certains produits de large consommation. Cette décision a été prise, à l'issue d'une réunion du bureau du Conseil de la nation, élargie aux présidents des groupes parlementaires. "Le Conseil de la nation a décidé, dans le cadre de ses responsabilités constitutionnelles à l'égard du peuple et conformément à l'article 159 de la Constitution et des exigences de la loi organique et du règlement intérieur y relatifs, de mettre en place une commission d'enquête parlementaire chargée d'enquêter sur les problèmes de pénurie et de monopole touchant certains produis essentiels de large consommation à travers le pays", souligne le Conseil de la nation dans un communiqué. Cette commission "fera la lumière sur les causes de cette crise, ses instigateurs et les parties qui l'alimentent", précise-t-il. La commission d'enquête "entamera son travail par la mise en place d'un programme d'action à court terme conformément aux mesures légales", ajoute le communiqué. Le Conseil de la nation rappelle l'adoption récemment, par les deux Chambres parlementaires, de "la loi relative à la lutte contre la spéculation illicite qui prévoit des dispositions et des mesures répressives". Depuis quelques jours certains produits de consommation, notamment l'huile de table et le lait UHT emballé dans des boîtes tétrapack, enregistrent des pénuries. Pour l'huile de table, les pénuries résulteraient d'un dysfonctionnement au niveau de la distribution. C'est du moins ce qu'a expliqué, jeudi dernier, le Premier ministre, ministre des Finances, Aïmene Benabderrahmane, en marge de la cérémonie de remise des affectations budgétaires aux administrations et établissements publics au titre de la loi de finances 2022. Aïmene Benabderrahmane a indiqué que les besoins nationaux s'élèvent à 1 600 tonnes par jour, alors que les capacités de production sont estimées à 2 000 tonnes par jour. En d'autres termes les capacités de production couvrent largement les besoins du marché national. Certains observateurs évoquent le refus des distributeurs de commercialiser l'huile alimentaire raffinée ordinaire, dont les prix à consommateur ainsi que les marges à la production, à l'importation et à la distribution sont plafonnés. Le Premier ministre promet un "retour à la normale" dans les prochains jours. Concernant le lait en tétrapack, certains experts pointent la gestion administrative du commerce extérieur. La pénurie résulte de la suspension de l'importation de la poudre de lait. Pourtant, l'Association des producteurs algériens des boissons (Apab) avait, officiellement, alerté le Premier ministre et le ministre du Commerce dans une correspondance sur les conséquences négatives de cette mesure. L'Apab évoquait le risque d'une rupture de stocks qui pourrait impacter le marché en matière de lait UHT et des produits laitiers. Certains producteurs n'ont pas importé de poudre de lait depuis l'été dernier. Entre-temps, ils ont épuisé tous leurs stocks. Du coup, les trois usines de Tchin-Lait sont à l'arrêt. L'unité de la Sarl Ramdy est presque à l'arrêt. Concernant le lait de la marque Soummam, disponible en faible quantité dans certaines supérettes d'Alger, son prix a augmenté. Il est vendu à 130 DA. Certains experts signalent, à juste titre, que les pénuries ne touchent que les produits sur lesquels l'administration intervient "en fixant les prix, les marges, en bloquant et en contrôlant les importations de matières premières". Ils estiment que si l'Etat s'abstient d'intervenir, "intempestivement" sur les marchés, "il n'y aurait pas de pénurie". Pour eux le taux de change est l'instrument par excellence pour la régulation des échanges commerciaux internationaux et la balance de paiement. "Si on utilisait cet outil, on aurait des augmentations de prix, mais pas de pénuries", soutiennent-ils. Pour réduire la facture d'importation, expliquent ces experts, il faut agir sur l'élasticité des prix à la demande.