Attaf participe à Antalya à la cérémonie d'ouverture de la 4e édition du Forum diplomatique d'Antalya    Professionnalisation du football: "la FAF a un rôle de leader et de catalyseur"    Tiaret: une caravane médicale au profit des habitants de la commune de Sidi Hosni    Ligue des champions: la commission de discipline de la CAF saisit le club algérois    Ligue 1 Mobilis: le match CSC-MCO reporté à une date ultérieure    Sadaoui préside une réunion pour la bonne préparation des examens scolaires nationaux    Tissemsilt: décès du moudjahid Bourdjem Tayeb    Saihi prône un système de gestion des services médicaux des nouveaux hôpitaux structuré en réseau pluridisciplinaire    Début des travaux de la réunion quadripartite de coordination sur la migration irrégulière à Naples    Agressions sionistes contre Ghaza: 50912 martyrs et 115981 blessés    Automobile : Fiat Algérie prend des mesures pour lutter contre la spéculation    Inhumation du Lieutenant-colonel Djoulem Lakhdar à Tissemsilt    Festival international de la poésie arabe classique: plus de 40 poètes et poétesses attendus à Biskra    Sonelgaz: une délégation irakienne sollicite le soutien de l'Algérie au secteur de l'énergie en Irak    Le chanteur malien Amadou Bagayoko n'est plus    Plaque commémorative au Consulat général d'Algérie à Tunis: un hommage aux moudjahidine et aux chouhada de la Révolution    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    Brèves    La Fifa organise un séminaire à Alger    150e Assemblée de l'UIP à Tachkent: la députée Farida Ilimi élue membre de la Commission de la santé    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Mme Mansouri rencontre la vice-ministre des Relations internationales    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    La force et la détermination de l'armée    Un rempart nommé ANP    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    La wilaya veut récupérer les locaux non utilisés    Fini le stress hydrique    Les opérateurs parlent de leurs problèmes    Le projet a été officialisé    Le Parlement persiste et signe    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    Les nouvelles lois relatives aux partis politiques et aux associations, en Algérie permettront-elles leur dynamisation pour une participation et mobilisation citoyenne ?    Contre une militarisation par Israël de l'aide humanitaire à Ghaza    Ooredoo participe à l'événement technologique ''Connected Algeria 2025''    14.000 projets pour relancer l'économie    Des partis politiques continuent de dénoncer la position du gouvernement de transition au Mali contre l'Algérie    Le 8 avril 1871, Cheikh Belhaddad proclamait l'insurrection contre le colonialisme français    Le classement des meilleurs buteurs des qualifications en Zone Afrique    Arsenal corrige le Real Madrid et prend une belle option pour les demies    Quand certains intellectuels algériens versent dans le zemmourisme à l'insu de leur plein gré    Création «prochaine» de délégations de wilayas de la société civile    «Pigeon voyageur» dans l'histoire du cinéma algérien    Renforcer la communication entre l'ONSC et la société civile pour promouvoir l'action participative    Les chauffeurs des autobus de voyageurs reviennent à la charge !    La menace de la cocaïne gagne du terrain !    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La "bonatirosation" d'un pays entier
L'AUTRE ALGERIE
Publié dans Liberté le 20 - 01 - 2022


Par : Kamel DAOUD
ECRIVAIN
L'un des plus néfastes legs de Bouteflika est celui des médias de débilisation collective : TV, chouyoukh guérisseurs, Zaibet & Cie, pilule contre le diabète, pronostiqueur de séisme et Bonatiro(s) diversifiés dans le délire, se délectant érotiquement de l'attention des caméras. Tout ce que fit le mythe de l'école algérienne, la scolarisation épique menée depuis l'indépendance, le livre, fut bien démantelé par ces chaînes et l'immense entreprise de régression qui en fut le but.
L'homme à l'égo galactique, vieillissant mal, connu pour ses penchants pour les mystiques des zaouïas et la prédilection quant à son destin unique, inocula à la nation entière cette maladie de la raison. Et, aujourd'hui, on le paye : un raqi, sorcier qui se propose pour sauver une équipe de football ; des générations de jeunes élevés à la croyance la plus grotesque face au réel ; des journaux qui "ouvrent" sur des sorciers capturés ; des sorts retrouvés dans des cimetières ; des prêches pour guérir de la prostate, du cancer ou de la stérilité en avalant une eau inconnue vendue par correspondance et vantée par des présentateurs ébahis, aux heures de grande écoute.
L'Algérie d'avant 1830 ? D'avant 1679 ? Oui, elle a bien existé et elle est là sous nos yeux maintenant. On laissera aux sociologues le soin de décortiquer cet effondrement de l'Algérie vers l'irrationnel, on n'en retiendra que l'amertume que cela laisse sur la langue. Pourquoi un pays entier, qui est né d'une guerre et pas d'un jet de salive ou de sort, d'un effort et pas d'un raqi, qui a fait de l'école et de la médecine une religion du progrès, en est arrivé là ? Et où cela va nous mener ?
Une sous-culture "débilisante" est aujourd'hui la vraie culture nationale, popularisée par le prêche, les réseaux sociaux, l'enfermement géographique et le dopage à l'épique guerrier.
Aux coupes de cheveux alambiquées, à cette déambulation démographique qui fait ressembler les Algériens à des Libyens encore nourris de subventions et de délires nationalistes, s'ajoute aujourd'hui l'immense fracas de la rationalité en miettes. Il touche presque tout : télévision, discours religieux idiots et féroces, mais aussi le foot, le corps, la santé et la politique. L'effondrement de la raison algérienne est presque partout. En politique, il se nourrit du délire d'une attaque imminente et d'un complot international.
En santé, on en est arrivé, après des décennies d'indépendance, à faire accueillir un "inventeur de remède contre la Covid", alias Bonatiro, par un ministre, et à réinventer le remède contre le diabète par un détraqué.
En politique, on en est l'identitaire qui croit que la démocratie est une région ou un emblème ou un tweet, ou son adversaire féodal qui croit qu'un Etat fort c'est un Etat qui refait la guerre à la France.
En foot, passons, tant l'épisode de la sorcellerie dont serait victime l'équipe algérienne est avilissant. Et pour la santé en général ? Il n'y a qu'à voir cette industrie de la bande défilante de certaines chaines TV, vantant dans le langage coranique soigné l'invention d'une eau pour guérir de 21 maladies, dans un labo situé "près de la mosquée Es-Sunna dans la commune de...", touchant au thème majeur de la détresse de l'âge mûr : la sexualité, la stérilité et l'épargne bénie car la banque est islamique, etc.
A qui ressemble aujourd'hui un jeune algérien dans ses convictions, sa coupe de cheveux, sa tenue, ses délires et sa rudesse, son machisme et son tribalisme, son ricanement et son envie, sa façon de trainer dans les airs ou de surveiller les femmes et de décrire le Paradis en volant ses propres chaussures dans une mosquée ? A qui ressemble-t-il dans son acculturation violente ? Ses visions outrageantes de l'universel, de l'art et du sexe ? Sa conception du corps et de la virginité, de la femme et de l'égalité ? Moins à un Algérien des années 90 qu'à un Libyen des dernières années de Kadhafi, quand celui-ci a voulu incarner dans le même accoutrement Arafat, Saddam et Boumediène, et distribuer gratuitement le pétrole et les bombes. Nous y sommes, et ouvertement, mais par le bas, par les TV, les mosquées, internet et l'échec scolaire collectif.
La misère algérienne est culturelle, profondément. Prenez un jeune Algérien des années 70 et un autre des années 2020 et vous verrez le chemin parcouru, inversement au sens du progrès vers l'ennui, le désert, la féodalité et le désœuvrement, la violence et le tribalisme, l'affect et l'irrationalité, la grossièreté et l'effet de meute.
En politique, en opposition, en tenues vestimentaires, en lutte pour l'identité, en coupes de cheveux, en façons de conduire et d'aimer et en postures, en morphologie et en santé dentaire. Presque tout. La "bonatirosation". Ce n'est pas pour rien que l'homme dit se souvenir de l'instant exact de sa naissance, presque avec une délectation inquiétante. Que faisons-nous d'autre, tous ensemble, depuis des décennies ?


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.