Initialement prévu pour hier au tribunal correctionnel de Mostaganem, le procès de Dalila Touat a été ajourné à la semaine prochaine en raison de l'absence de la juge d'audience, a appris Liberté auprès des avocats de la défense du Hirak. L'activiste de Mostaganem doit répondre d'"incitation à attroupement", "outrage à corps constitués" et "diffusion de publications pouvant porter atteinte à l'intérêt national", chefs d'accusations que le parquet a choisis pour qualifier des publications qu'elle avait partagées sur les réseaux sociaux. Depuis son arrestation le 31 janvier et son placement, dès le lendemain, sous mandat de dépôt par le juge d'instruction du tribunal de Mostaganem, Dalila Touat est entrée en grève de la faim pour dénoncer "le harcèlement dont elle fait l'objet et ses conditions de détention à la prison pour femmes d'Aïn Tedlès", indiquent ses avocats. "Elle refuse de se nourrir et même de s'hydrater. Nous lui avons rendu visite il y a deux jours et l'avons trouvée affaiblie physiquement et très touchée psychologiquement", rapportent Mes Omar Boussag et Messaoud Aït Rahmane qui ajoutent que la détenue a averti la direction de l'établissement pénitentiaire de son entrée en grève de la faim. Il n'est pas inutile de rappeler ici que la jeune femme avait déjà séjourné dans la prison pour femmes en janvier 2021 et, qu'une fois libérée, elle avait tenté de poursuivre la direction pénitentiaire pour mauvais traitements. Ce n'est pas la première fois que Dalila Touat est ainsi traînée devant la justice : en 2011 déjà, elle est poursuivie pour avoir organisé une protestation devant la Grande-Poste de la ville en tant que porte-parole des chômeurs de Mostaganem. L'événement fait grand bruit et entraîne un large soutien des militants des droits de l'Homme et animateurs du mouvement associatif qui affluent de nombreuses wilayas pour afficher leur solidarité avec celle qui allait devenir un symbole de la lutte pour les libertés. Grâce à cette mobilisation et au soutien de nombreux avocats de renom qui ont démontré la vacuité du dossier d'accusation, Dalila Touat obtient la relaxe et peut reprendre son activisme. Près d'une décennie plus tard, soit en novembre 2019, son activisme au sein du Hirak lui vaut d'être condamnée, une première fois, à deux années de prison ferme sans mandat de dépôt pour tentative de perturbation de l'élection présidentielle du 12 décembre 2019. Et une deuxième fois, le 18 janvier 2021, à 18 mois de prison ferme pour "outrage à fonctionnaires et institutions de l'Etat", "diffamation" et "publications portant atteinte à l'ordre public". Dalila Touat séjournera à la prison pour femmes d'Aïn Tedlès jusqu'au 19 février quand elle bénéficiera de la libération des détenus d'opinion décidée par le chef de l'Etat à la veille de la commémoration du 2e anniversaire du Hirak. Plus tard, en mars, la cour d'appel de Mostaganem annule les deux verdicts prononcés en première instance (deux années sans mandat de dépôt et 18 ferme) et condamne l'activiste à deux mois avec sursis. Libre de ses mouvements, Dalila Touat introduit un pourvoi en cassation contre les deux sentences et porte plainte contre la direction de l'établissement pénitentiaire d'Aïn Tedlès pour "mauvais traitement et non-suivi médical" lors de la grève de la faim qu'elle avait observée. De plaignante, Dalila Touat échoue étrangement sur le banc des accusés du tribunal d'Aïn Tedles, poursuivie par la même direction pénitentiaire contre laquelle elle avait porté plainte auprès du procureur général de la cour de Mostaganem. En novembre 2021, elle est jugée pour "outrage à institution publique" et est condamnée à six mois de prison ferme.