La loi française du 23 février aura-t-elle eu raison de la signature du traité d'amitié entre la France et l'Algérie voulu par les chefs d'Etat des deux pays alors que la relation bilatérale était en pleine refondation ? Les craintes semblent se confirmer malgré les assurances données de part et d'autre, notamment du côté de Paris qui n'a pas cessé de réaffirmer son attachement au projet. Une chose semble désormais certaine : le calendrier ne sera pas respecté. Au demeurant, les responsables français et algériens interrogés ces derniers mois ont refusé de s'engager sur une date alors que les deux chefs d'Etat s'étaient promis de parachever le processus avant la fin de cette année. “L'habillage politique” du traité semble poser problème, selon le quotidien Le Monde qui donne très peu de chances à la signature dans les délais prévus alors que l'aspect technique est “bouclé depuis longtemps”. Par habillage politique, Le Monde entend la loi du 23 février et la question des harkis que rien ne semble pouvoir débloquer. Y compris une rencontre entre Chirac et Bouteflika dimanche à Barcelone en marge du Sommet euroméditerranéen. “Il faudra peut-être une nouvelle réunion entre les deux présidents, sans doute à Paris”, selon un haut fonctionnaire français cité par Le Monde qui révèle que la France avait admis le principe de présenter des excuses à l'Algérie avant que la loi du 23 février ne vienne tout chambouler à cause d'une de ses dispositions qui souligne “le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord”. Pour l'Algérie, la colonisation est le souvenir d'une population décimée au quart, aux premières années de la conquête, par les massacres et les enfumades semblables aux fours crématoires nazis selon l'expression du président Bouteflika. C'est le souvenir d'une population spoliée de sa terre et dépossédée de sa culture et de sa personnalité. Celui de la torture lors des années de la guerre d'indépendance. La France veut peut-être, en évidence, la réalisation d'infrastructures qui ont profité à la minorité de colons. Nicolas Sarkozy, numéro 2 du gouvernement et président du parti au pouvoir, l'UMP, l'a rappelé récemment. “Quand je me promène à Alger, je m'aperçois que la présence de la France en Algérie ne peut pas être réduite à la torture”, disait-il. Faudra-t-il miser sur la relation personnelle entre les deux chefs d'Etat pour sortir de l'impasse ? Yacine KENZY