La commission marocaine d'enquête sur les années noires du règne de Hassan II a remis son volumineux rapport sur les violations des droits de l'homme dans le royaume de 1956 à 1999, date de l'arrivée au pouvoir de Mohamed VI. Chargée de faire la lumière sur cette tranche obscure de l'histoire du Maroc depuis son indépendance, elle a entendu des milliers de témoins venus raconter des cas d'enlèvements, de disparitions, de détentions arbitraires et de tortures. Quelque 30 000 dossiers de demande d'indemnisation ont été constitués. Dans le document final, qui devrait être rendu public le 10 décembre, la commission présente plusieurs recommandations sur les réparations et les mesures à prendre pour éradiquer à jamais de telles situations. Les ONG marocaines chargées de la défense des droits de l'homme ont critiqué cette commission dont Mohammed VI avait décidé qu'elle n'aura pas vocation à se constituer en tribunal pour juger les responsables présumés des différentes vagues de répression. Mais, selon des membres de la commission, les témoignages recueillis pourraient servir de base pour d'éventuelles poursuites judiciaires. Les victimes ont eu, en effet, la possibilité de désigner leurs tortionnaires dans leurs dépositions confidentielles. Il n'était pas en revanche permis de mettre en cause nommément les auteurs de tortures et d'exactions lors des nombreuses auditions publiques diffusées à la télévision à des heures de grande écoute. Dirigée par Driss Benzekri, un ancien prisonnier politique enfermé pendant dix-sept ans dans le plus terrible bagne du royaume chérifien, la commission aura eu le mérite, selon la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), de libérer la parole. La FIDH estime néanmoins que “la montagne accoucherait d'une souris” si le rapport ne comportait pas la suppression de la peine de mort et la ratification du statut de Rome qui ferait du Maroc le 101e pays adhérent et le deuxième dans le monde arabe avec la Jordanie.