Ce renvoi a été qualifié par le collectif des avocats de volonté délibérée de faire durer la détention des deux inculpés. Bien avant le début du rassemblement populaire prévu, hier à 10h, devant le tribunal de Tizi Ouzou afin d'exiger la libération immédiate et inconditionnelle de tous les détenus du mouvement citoyen, un important dispositif antiémeutes a été installé aux alentours de l'institution judiciaire, le lieu où devait se dérouler la manifestation et même à l'intérieur du jardin public situé en face du tribunal. C'est ainsi que toutes les personnes venues participer au sit-in ont été systématiquement sommées par les policiers de quitter les lieux. Ce n'est que vers 11h qu'une foule a tout de même pu se former, mais un peu plus loin, en face du CNEPD, à côté du jardin public. Vers midi, une minute de silence a été observée, le dos tourné à l'institution judiciaire, par les délégués et manifestants, avant de lever le sit-in. Les CNS, dont trois Nissan étaient stationnées devant le tribunal, ont essayé d'intervenir à ce moment-là car des pierres, des bouteilles et autres projectiles ont été lancés contre les forces de l'ordre. Pendant ce temps-là, un autre scénario se déroulait à l'intérieur du tribunal correctionnel près la cour de Tizi Ouzou. Bélaïd Abrika et Mouloud Chebheb se trouvant depuis 10h dans l'enceinte du tribunal, ont été transportés de la maison d'arrêt de Tizi Ouzou où ils étaient surveillés de très près par de nombreux policiers. Plusieurs membres du collectif des avocats de la défense des détenus du mouvement citoyen étaient présents, eux aussi pour assister les deux délégués pendant leur audition par le juge d'instruction. Rappelons que Abrika est à son sixième mandat de dépôt dans le dossier pour lequel lui et Chebheb ont été convoqués, hier, mandat de dépôt qui est apparemment récent, mais dont les chefs d'inculpation sont pratiquement les mêmes. Cette fois-ci, c'est le juge d'instruction qui a créé l'incident ayant pour origine le renvoi de l'affaire, selon les avocats. Bélaïd Abrika à qui le juge d'instruction posait des questions sur les meetings, particulièrement celui qui s'est déroulé à Tizi Ghenif à l'issue duquel quelqu'un aurait été assassiné. “Je ne suis pas un terroriste”, aurait-il répliqué au juge qui aurait demandé à celui-ci de lui relire ses anciennes déclarations concernant ses réponses aux mêmes questionnements auparavant posés par le même magistrat, chose que ce dernier aurait catégoriquement refusée. Les avocats ont alors protesté en disant que le prévenu a le droit de réécouter le contenu de ses anciennes déclarations. Le juge ne l'entendant pas de cette oreille a décidé de renvoyer l'affaire sine die, décision que des avocats ont qualifiée de volonté délibérée de faire durer la détention, accusant même le juge d'instruction d'avoir eu l'intention, dès le départ, de renvoyer l'affaire. Après cet incident, même Mouloud Chebheb n'a pu être auditionné, le juge ayant reporté l'audition pour les deux détenus à une date restée indéterminée. Les deux détenus ont immédiatement été ramenés à la maison d'arrêt de Tizi Ouzou. K. S.