Lancée après les attentats de Madrid en mars 2004, la campagne de lutte contre le terrorisme atteint son apogée cette année en Espagne avec des dizaines d'arrestations dans les milieux islamistes et le recensement des lieux de leurs activités. Selon une enquête publiée hier par le quotidien madrilène El Pais, il existe dans la péninsule ibérique plus de “600 centres de culte islamiste”, soit plus du double des “272 entités religieuses musulmanes recensées par le ministère de la Justice”. Le journal ajoute que “la plupart se situent dans des appartements et dans des locaux hors du contrôle de l'administration”. Il est précisé que les enquêteurs ont recensé six mosquées créées par la secte Takfir wal hijra, un courant extrémiste du salafisme considéré comme inspirateur des attentats de Madrid. Ces informations ne font que rajouter à la peur des Espagnols, déjà effrayés par les informations rapportées sur la montée des activités des islamistes dans leur pays, malgré la vigilance de la police et les nombreuses arrestations qui avoisinent la centaine depuis le début de l'année. En effet, jusqu'à novembre dernier, 63 suspects avaient été arrêtés dans ce cadre. Le 9 décembre courant, sept personnes soupçonnées de financer le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien ont été interpellées dans plusieurs localités de la Costa del Sol, dans le sud de l'Espagne. Quatre d'entre elles ont été remises en liberté sans suite la semaine suivante et trois autres ont été placées en détention provisoire pour collaboration présumée avec une organisation terroriste. Dans la nuit de dimanche à lundi derniers, quinze personnes suspectées d'avoir des activités liées au terrorisme islamiste ont été arrêtées dans plusieurs villes d'Espagne, a annoncé hier le ministre espagnol de l'Intérieur, Jose Antonio Alonso. Une centaine de policiers a été mobilisée pour l'opération, dont des agents de la police scientifique et des experts en explosifs. Six des suspects ont été arrêtés à Malaga, trois à Lerida, trois à Nerja, deux à Séville et un dans l'archipel des Baléares. À en croire les déclarations du ministre, ces personnes se livraient à des activités “d'endoctrinement et de recrutement d'individus pour le djihad”, en Irak. Alonso est allé jusqu'à affirmer qu'il y avait déjà “deux moudjahidine préparés pour être envoyés” dans ce pays. La tête du réseau est M. Hiyag, alias Abou Sufian, un Irakien de 25 ans qui était en communication avec les contacts à l'étranger et en Irak où il disposait d'un accès très proche à Abou Moussab Al-Zarqaoui, selon la même source. Livrant d'autres détails, le membre du gouvernement de Zapatero dira que le groupe démantelé était structuré en un noyau qui prenait les décisions, une cellule pour le recrutement de nouveaux adeptes et une autre consacrée à la falsification de documents. Ce groupe avait noué des liens via Internet avec d'autres cellules à l'étranger, a précisé le ministre. Les perquisitions effectuées par les forces de police de domiciles et de commerces ont permis la découverte de produits, acide citrique, solvants, qui peuvent être utilisés pour la fabrication d'engins explosifs, même s'il leur manque certains composants indispensables pour préparer effectivement des bombes, a encore expliqué le ministre. La police espagnole n'a cependant aucune preuve que ce groupe ait “prévu de commettre un quelconque attentat sur le territoire espagnol”. Citant des sources policières, la presse ibérique rapporte que la plupart des suspects sont marocains. Les autres sont originaires d'Egypte, d'Algérie et du Ghana. K. ABDELKAMEL