La sûreté fédérale américaine a demandé à ses bureaux de faire le décompte des mosquées de leur secteur. Certaines pourraient, selon son directeur, servir de couverture à des activités terroristes. Quelques jours seulement après les coups de filet menés en Espagne et en Grande- Bretagne dans les milieux islamistes soupçonnés d'être en liaison directe avec l'organisation de Oussama Ben Laden, l'Administration Bush passe à son tour à l'offensive. Selon une information publiée hier par l'hebdomadaire Newsweek, le FBI, la sûreté fédérale américaine, a demandé à ses 56 bureaux régionaux de faire le décompte des mosquées de leur secteur pour une étude démographique dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Le directeur de la police US, Robert Mueller, a exigé de chacune de ses structures de procéder à ce travail qui servira, selon lui, à établir des objectifs pour les enquêtes antiterroristes et des écoutes de suspects. Contestée par les milieux musulmans, cette décision est défendue bec et ongles par le FBI, dont un responsable a déclaré au journal américain, que ses services avaient recueilli des indications inquiétantes sur certaines mosquées qui pourraient servir de couverture à des activités terroristes. “Ce n'est certainement pas politiquement correct”, a-t-il souligné, mais il serait stupide de s'en préoccuper, étant donné le nombre de ces lieux de culte se livrant peut-être à des activités criminelles”. Ces déclarations des responsables de la sûreté fédérale n'ont pas tardé à susciter la réaction des dirigeants islamiques qui estiment que derrière la décision de mettre sous surveillance les mosquées, “il y a des motivations raciales”. “Il est effrayant d'entendre qu'il s'agit là vraiment d'une politique officielle”, a ajouté, par ailleurs, toujours dans les colonnes du même journal, Ibrahim Hooper, porte-parole du Conseil des américano-islamiques pour qui une telle décision montre tout simplement que les autorités américaines considèrent “toutes les communautés islamiques avec suspicion”. Mais l'Administration Bush semble, fermement décidée à étendre son contrôle à tous les milieux qui jouissaient jadis d'une liberté totale d'action, mais qui, aujourd'hui, constituent aux yeux de l'Oncle Sam une réelle menace sur les States. Les Etats-Unis sont en guerre, ne cessent de déclarer les responsables de la première puissance mondiale qui voudraient, après les attentats du 11septembre 2001, arriver à un niveau de risque zéro. Tous les moyens sont mobilisés pour atteindre cet objectif. Dans le cadre, d'ailleurs, de cette lutte généralisée contre les réseaux terroristes, les Américains ont procédé, vendredi dernier, au blocage des avoirs de deux Asiatiques soupçonnés d'appartenir à la Jemaâ Islamiya laquelle entretiendrait des liens étroits avec Al-Qaïda. Cette offensive vient, en effet, quelques jours seulement après les opérations coup de poing dans les milieux islamistes en Europe, notamment en Grande-Bretagne, en Espagne, en France et en Italie. On se rappelle qu'en Angleterre, Scotland Yard avait arrêté plusieurs personnes à la mosquée de Finsbury Park(nord de Londres) d'où le radical Imam Abou Hamza Al-Masri est menacé d'expulsion. En Catalogne, la police espagnole a fait de même en mettant la main sur un réseau terroriste de 16 éléments ayant des liens avec d'autres groupes qui préparaient des attentats en Europe. Parmi eux figurent plusieurs Algériens activant pour le compte de l'organisation terroriste de Hassan Hattab (GSPC). Si les Etats-Unis ont décidé donc d'imposer une surveillance étroite sur les mosquées, ils ont forcément dû tirer des leçons de l'expérience européenne en la matière, car les plus dangereux terroristes sont sortis de certains milieux de culte, jusque-là incontrôlés, où des prêcheurs audacieux ont conduit une œuvre efficace d'endoctrinement de la jeunesse des banlieues défavorisées. S. R.