Les travailleurs des 19 filiales de Giplait ont décidé de reprendre eux-mêmes leur outil de travail après le désistement du groupe français Lactalis qui avait exprimé son intention d'investir en Algérie en rachetant, sous certaines conditions, plusieurs filiales du groupe Giplait. Des conditions que les représentants des travailleurs ont rejetées, craignant pour leur devenir et celui de leurs filiales. Les syndicalistes de toutes les filiales organisées en une coordination nationale étaient présents, hier, au niveau du siège du groupe Giplait à Alger pour retirer les cahiers des charges prévus pour cette opération de rachat. Les sections syndicales de ces filiales, dont l'effectif total est évalué à 4 600 travailleurs, ont pris soin d'organiser, ces trois derniers jours, en présence d'huissiers de justice des assemblées générales au niveau de leurs unités au cours desquelles les travailleurs ont opté clairement pour la formule RES (rachat de l'entreprise par les salariés), telle que définie par le décret 2001-353 du 10 novembre 2001 et les différentes circulaires émanant du CPE. À Boudouaou, les 350 travailleurs de l'unité Laiterie-Fromagerie de Boudouaou (LFB) se sont exprimés, avant-hier, en présence des cadres dirigeants de l'entreprise et d'un huissier de justice pour cette formule. Même chose à Drâa Ben-Khedda, Birkhadem, Blida, Alger, Oran et dans l'est du pays ; les travailleurs ont, selon le secrétaire général de la coordination, décidé à l'unanimité la reprise de leurs unités. “Le président de la République tout comme les textes parlent également de partenariat, alors que la privatisation telle que présentée actuellement se limite au rachat de l'entreprise par le privé ou par les travailleurs. Le terme partenariat a disparu, on a été donc contraint d'opter pour la formule RES”, nous a affirmé, hier, le secrétaire national de la coordination du groupe Giplait. Le même responsable cite l'exemple du complexe de Sidi Saâda de Relizane qui a coûté à l'Etat plus de 400 milliards de centimes, alors qu'un privé algérien a proposé pour son rachat, lors de la première consultation, 25 milliards de centimes. “Est-ce logique ?” s'interroge le syndicaliste qui dit ignorer les suites à réserver par la SGP sur les propositions de Lactalis. Pour rappel, le groupe français, un des leaders dans la production du lait et de fromage à l'échelle européenne, s'est rapproché ces derniers mois de la SGP Tragral pour prendre part au capital de ces filiales à hauteur de 70%, mais, selon des sources syndicales, les responsables de Lactalis ont émis des réserves sur le mode de gestion de certaines filiales, préconisant le changement d'activité de certaines d'entre elles et la réduction des effectifs dans d'autres. D'où les appréhensions des travailleurs et leurs représentants qui tiennent à rappeler les engagements du président de la République et de Sidi-Saïd selon lesquels “la privatisation ne se fera pas au détriment des travailleurs, encore moins dans l'opacité”, précisent-ils. Reste à savoir si les responsables de la SGP et le CPE accéderont à la demande des travailleurs sachant que plusieurs entreprises, ayant opté pour cette formule, ont vu leurs offres rejetées à l'exemple des unités EPRC. Mais les travailleurs du groupe Giplait, dont les filiales couvrent près de 56% des parts du marché pour le lait pasteurisé et 5% seulement pour les autres produits (fromage et yaourt), sont prêts, si l'on en croit les responsables de la coordination, à ouvrir le capital de leurs filiales, une fois acquises, à d'autres partenaires étrangers pour se consolider davantage sur un marché où la concurrence est très rude. M. T.