Plus de 4 kilomètres de plage souillés par du fuel échappé des réservoirs du Cougard, un bateau qui a coulé, vendredi dernier, au large de Tipasa. Une catastrophe écologique sans précédent en Algérie. Toute la côte allant du Mazafran (wilaya de Tipasa) en passant par Khelloufi, Azur-Plage, Palm-Beach jusqu'a Sidi Fredj est souillée par un produit visqueux et collant ressemblant à du goudron. Les premières galettes apparues samedi sur le rivage de Palm-Beach, une plage à 20 km à l'ouest d'Alger, inquiètent les autorités locales qui alertent le ministère de l'Environnement. Une fois sur place, les responsables mettent en œuvre le comité Tell-Bahr (un comité qui regroupe différents ministères, les gardes-côtes, la Protection civile et les organismes locaux). Un plan d'urgence est très vite mis en branle. Selon les premiers éléments de l'enquête, la nappe de fuel viendrait d'une fuite des réservoirs du Cougard, navire battant pavillon Saint-Vincent en provenance d'Espagne. Le navire transportait 240 tonnes de kaolin, un produit utilisé dans la fabrication de brique et de céramique. Poussé par la forte houle et des vents de nord-ouest, le bateau a sombré non loin des côtes de Tipasa. Les 16 membres de l'équipage ont été sauvés par les gardes-côtes algériens. Pour autant, les enquêteurs n'écartent pas la possibilité que des bateaux aient effectué un dégazage ou un déballastage au large afin de s'alléger pour affronter la forte tempête. Le mauvais temps qui sévit, ces dernières semaines, en Méditerranée, est responsable de plusieurs avaries de bateaux. A l'est du pays, trois navires ont échoué sur les plages de Skikda et Jijel. Depuis dimanche, 7 heures, 400 hommes de la Protection civile et 100 agents de la commune de Staouéli sont à pied d'œuvre pour nettoyer la plage de Palm-Beach. L'endroit connaît la plus importante concentration de galettes de fuel. L'opération de nettoyage qui s'est poursuivie jusque tard dans la journée dans un ballet incessant d'engins, de pelleteuses et de camions-bennes, a permis de déblayer plusieurs tonnes de déchets stockées à proximité de la wilaya d'Alger dans un site sans risque de pollution. Le ministre de l'Environnement, qui s'est rendu sur les lieux de la catastrophe en compagnie du président de l'APC de Staouéli, du responsable du comité Tell-Bahr et du responsable de la Protection civile où il a constaté de visu l'ampleur de la situation, a tenu à préciser que tous les moyens ont été mis en place afin de faire face à la situation : “Dès que les autorités locales m'ont averti de la situation, en collaboration avec les walis concernés par cette catastrophe, nous avons mis en place un plan d'urgence réparti en trois points, l'analyse des effluents, la mobilisation de l'ensemble des intervenants sur terre (la Protection civile suivant Tell-Bahr), la mise à la disposition des équipements de ramassage ainsi que les équipements de transport, et aussi la mise en place d'un site de stockage non polluant au niveau de la wilaya d'Alger. Nous sommes actuellement en train d'analyser en laboratoire la nature de ce produit. L'enquête est en cours pour déterminer l'origine exacte de cette pollution”. Les premières mesures prises à la suite de la catastrophe : le ministre de l'Environnement vient de promulguer un décret interdisant l'accès aux plages polluées, il a demandé au ministre des Transports d'interdire progressivement l'arrivée des bateaux à coque simple (appelés poubelles des mers), ainsi que la liste des bateaux de plus de quinze ans pour leur interdire l'accès à nos ports. Sur l'évolution de la situation, M. Cherif Rahmani dira : “En raison des vents qui continuent à souffler, dit-il, nous craignons que d'autres nappes atteignent la côte, mais le comité Tell-Bahr veille nuit et jour sur l'évolution de la situation pour parer à une autre vague de pollution et pouvoir intervenir au moment venu.” L'Algérie est-elle en mesure de faire face à une catastrophe de grande ampleur ? Le ministre est catégorique : “Nous serions complètement démunis face à une marée noire de type Prestige. Nous ne sommes pas à l'abri d'une pollution, même si nous faisons les efforts nécessaires pour y faire face en renforçant nos capacités d'intervention.” M. O.