Cette situation oblige le propriétaire, en un mot l'Etat, à recapitaliser de nouveau les banques publiques. Le secrétaire général du ministère des Finances a confirmé, mardi dernier, lors d'une rencontre sur le droit bancaire l'importance des créances non performantes, détenues par les banques publiques, en particulier sur le secteur privé. “Ces créances, (en un mot des crédits non remboursés ) représentent 44% des prêts distribués au secteur privé”, a-t-il ajouté. En clair, il confirme le chiffre de 3 à 4 milliards de dollars, l'équivalent de 200 à 300 milliards de dinars de créances non performantes détenues par les banques, avancé par un expert financier l'année dernière. L'importance de ces impayés oblige les banques publiques à approvisionner. Ce qui signifie qu'une partie des ressources collectées est réservée à cet effet au lieu d'être affectée à l'investissement créateur d'emplois et de richesses. Seconde contrainte : le propriétaire, pour mieux valoriser ces banques à la veille de leur privatisation, se retrouve forcé de les recapitaliser. À défaut, il sera obligé de les privatiser pour une “bouchée de pain”. Par ailleurs, si cette situation d'impayés — qu'on peut schématiser ainsi : de l'argent qui sort des banques et qui n'est pas compensé par de l'argent qui rentre — persiste, voire s'amplifie, les banques publiques risquent à la longue la faillite. Elle pose la question du traitement des créances non performantes du secteur privé. C'est un nouveau phénomène qui a donc pris de l'ampleur. Car auparavant, le problème qui encombrait les banques, c'était les créances détenues sur le secteur public. Aujourd'hui, les banques accumulent les créances non performantes des secteurs public et privé. Ce qui complique les choses, c'est que l'Etat hésite aujourd'hui à traiter ces dettes. En un mot, qui doit payer ? Allons-nous vers le rééchelonnement de ces dettes ? À quelles conditions ? Insuffisante capacité d'analyse des dossiers de crédit Ces questions restent pendantes. Les tergiversations des pouvoirs publics retardent ainsi le processus de réforme bancaire. Qui ne s'assimile pas, loin s'en faut, à la mise en place uniquement d'un système de paiement moderne. Il convient de reconnaître que la tâche des autorités financières n'est pas facile. Outre les effets des scandales bancaires qui ont touché particulièrement la BNA, le cordon ombilical, qui est loin d'être coupé entre les banques d'Etat et les entreprises publiques fortement déstructurées, s'ajoute le poids des créances non performantes qui mine leur santé, obligeant le propriétaire à prendre des mesures de sauvegarde. Tout se joue dans la rapidité de réaction. En fin de compte, la réforme bancaire est freinée par l'insuffisante capacité d'analyse des dossiers de crédit et les injonctions, d'où l'indispensable apport de l'expertise nationale et étrangère, particulièrement à travers les fonds d'investissement et les ouvertures de capital. Si les banques publiques qui dominent le marché ne sont pas au plus vite réformées, elles ne joueront pas leur rôle de catalyseur de l'économie. On dira dans ce cas adieu à la croissance créatrice d'emplois et de richesses, amorcée au moins durant le second mandat présidentiel, s'appuyant non pas seulement sur les résultats du secteur pétrolier, mais aussi sur l'essor de l'appareil productif hors hydrocarbures et l'investissement privé. N. Ryad