L'opposition démocrate américaine ne se sent plus liée par l'obligation de réserve. Après les tirs à fleuret moucheté contre la Maison-Blanche, désormais, c'est la grosse artillerie. Bush est carrément traité d'incapable ! Guerre en Irak, mauvaise gestion des catastrophes naturelles, déficits budgétaires, flambée des prix de l'essence, procès d'Al Qaïda à travers un lampiste (le français Moussaoui), tentatives de vente des grands ports de la côte est à un groupe arabe... toutes les mauvaises nouvelles, qui ont fait chuter dans les abysses l'étoile du président américain, ont une seule et même source : son “incompétence”. Ce slogan, commode mais incisif, a éclipsé l'accusation de “corruption”, en vogue depuis plusieurs mois, et qui avait servi à dénoncer tous les ennuis judiciaires de la Maison-Blanche et des proches de Bush, de l'inculpation de l'ex-directeur de cabinet du vice-président Dick Cheney, Lewis Libby, à la condamnation à huit ans de prison du parlementaire républicain Randy Cunningham pour corruption passive. Le chef de l'opposition sénatoriale Harry Reid a utilisé le mot incompétence trois fois en deux phrases, se moquant d'une bourde commise par une avocate du département des Transports, qui a failli faire tourner court le procès de Moussaoui que Bush souhaite capitale pour exorciser les attentats du 11 septembre. “Rendez-vous compte, même ça, ils n'y arrivent pas !” devait s'exclamer, avec ironie, Harry Reid. Le verdict des démocrates est, par ailleurs, partagé par des républicains et pas des moindres. Tel Stephen Hess, politologue de la prestigieuse Brookings Institution, qui fut un collaborateur du président républicain Dwight Eisenhower dans les années 1950. De l'incompétence de gestion, lâche Hess (se référant au fiasco de l'après-cyclone (Katrina), couplée à celle politique (comme dans le cas du tollé, que personne n'avait vu venir à la Maison-Blanche, soulevé en février par l'affaire des ports que devait reprendre la société émiratie DP World). Les tirs croisés contre Bush devraient s'accélérer à l'approche de la campagne électorale pour les sénatoriales. Les démocrates pensent retourner la configuration politique marquée par l'emprise des républicains. La Maison-Blanche n'a pas encore perdu la main mais les derniers sondages montrent que Bush est, actuellement, plus impopulaire que jamais, avec 36% de satisfaits et 60% de mécontents. D. Bouatta