À Illizi, à quelque 2 000 kilomètres au sud-est d'Alger et à quelques encablures de la frontière libyenne, s'est tenue, hier, une conférence-débat dont l'intitulé est pour le moins significatif : “La résistance populaire des Touaregs dans le Tassili et le Hoggar durant la période coloniale.” C'est ce qu'a indiqué l'APS en soulignant que la rencontre a eu lieu en présence du ministre des Moudjahidine, M. Mohamed-Chérif Abbas, qui qualifiera d'emblée la région d'Illizi de “forteresse de la résistance coloniale”. La famille révolutionnaire était présente en force à cette occasion à travers les secrétaires nationaux de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), de l'Organisation nationale des enfants de chouhada (Onec), et ce, outre des notables de la région. Sans vouloir diminuer de l'importance intrinsèque de cette rencontre, on ne saurait en occulter la portée politique pour si peu que l'on tienne compte du contexte un peu délicat dans lequel elle intervient ; contexte marqué par les récentes tractations libyennes autour du projet d'un “Grand Etat du Sahara”. Si l'on faisait une légère rétrospective de tous les derniers évènements qui ont émaillé la région du Sahel, force est de déceler, en effet, sous les oripeaux d'une manifestation commémorative, le signe d'une volonté de la part des autorités d'Alger de reprendre l'initiative dans des territoires laissés jusque-là à la merci de mercenaires de tout acabit. Le message subliminal des autorités aux notables touaregs, qui étaient dans la salle de ce séminaire, semble surtout être un message de cohésion nationale et de resserrement des rangs et, surtout, des frontières. Tel semble être la véritable portée du “geste” en direction d'une population qui, au vu d'une marginalité de fait, se trouve quelque peu “hors-champ” et exposée à des manœuvres insidieuses visant à l'intégrer dans des géopolitiques pernicieuses. En plus clair, une manière de contrecarrer les visées du sieur Al-Kadhafi et son projet sécessionniste. Rappelons, à ce propos, la sortie pour le moins inamicale, du leader libyen la veille du Mawlid Ennabaoui lorsque, dans un discours à Tombouctou, il avait donné libre cours à ses lubies en lançant un appel pour l'édification d'un grand Etat touareg transfrontalier qui embrasserait tout le Sahel. La riposte d'Alger ne se fera pas attendre. On aura relevé, notamment, une intensification des ballets diplomatiques ces dernières semaines sur l'axe Alger-Niamey et Alger-Bamako, sans parler de la récente visite du président mauritanien, Ely Ould Mohamed Vall. Le chef de la “Djamahiriya Libiya” se serait-il rendu compte de la frivolité de sa foucade? Hier, un émissaire libyen, en la personne de M. Ahmed Gueddaf El-Dem, a été reçu par le président Bouteflika en présence de M. Belkhadem. Quel était l'ordre du jour de cette audience ? La dépêche APS — très laconique — qui a donné l'information, ne l'a pas précisé. Mais il est aisé de conjecturer que dans cette démarche, il y a comme une volonté affichée de la part du zaïm libyen de revenir à une attitude plus mesurée à l'endroit d'un voisin stratégique. “On ne comprend pas l'attitude d'Al-Kadhafi. C'est un homme imprévisible” devait commenter, sous le sceau de l'anonymat, une source proche du dossier, avant d'ajouter : “C'est une attitude qui a gêné les intérêts de l'Algérie dans la région, mais aussi de tous les pays avec lesquels la Libye partage de grandes frontières à l'instar de l'Egypte.” “Al-Kadhafi vise à se présenter comme la locomotive du Maghreb, alors que dans les circonstances actuelles, il ne peut être que le wagon”, assène notre source. M. B.