Dans sa dernière édition, le mensuel El Djeïch lève le voile sur la participation de l'armée algérienne dans la guerre arabo-israélienne d'octobre 1973. Le 6 octobre 1973, les armées égyptienne et syrienne lançaient une offensive surprise contre des positions israéliennes afin de reconquérir les territoires occupés par Israël depuis la guerre dite des Six Jours, qui s'est déroulée en 1967. Le but attendu de la guerre du Kippour est la libération de la péninsule du Sinaï, de la bande de Gaza, la Cisjordanie et le plateau du Golan. Si cet épisode du conflit arabo-israélien est à présent bien connu, la participation de l'Algérie restait jusque-là entourée du secret d'Etat. Trente-trois années après les évènements, la revue El Djeïch revient, dans son dernier numéro, sur les détails de la participation de l'Armée nationale populaire dans cet affrontement armé entre pays arabes et Israël et les motifs qui ont présidé à l'envoi sur le front de ses unités opérationnelles. Et c'est la 8e Brigade blindée, la fameuse 8e BB qui venait juste d'être créée, qui fut dépêchée afin de concrétiser “le devoir de solidarité agissante envers les causes justes et plus particulièrement vis-à-vis de la cause arabe”, écrit El Djeïch dans son édition d'octobre. C'est ainsi que l'on saura, en lisant cet hommage rendu aux soldats algériens de cette époque, que plus de 3 000 militaires se sont rendus, par voie terrestre, en Egypte. L'Algérie, en plus de ces soldats, tous grades confondus, a également envoyé du matériel militaire à la hauteur du conflit : 128 chars et engins blindés, 12 canons d'artillerie, 16 canons antiaériens. À cela s'ajoutent 4 escadrons d'avions de combat, soit au total 50 appareils. Le choix de prendre part activement à la libération des terres arabes a été pris, poursuit El Djeïch, par le Conseil de la révolution et le Conseil des ministres réunis dès le 7 octobre, c'est-à-dire le lendemain de l'ouverture des hostilités entres les armées syrienne et égyptienne, d'un côté, et les troupes ennemies alors commandées par Ariel Sharon, de l'autre. Le communiqué insiste sur la solidarité de l'Algérie dont l'objectif final est “la libération totale des territoires occupés avec tous les moyens en notre possession”. La 8e BB, alors stationnée à Téleghma, reçoit l'ordre de faire mouvement, et après treize jours de parcours rejoint la banlieue du Caire. De la capitale égyptienne, les soldats algériens arrivent à la ligne de front dans la nuit du 6 au 7 novembre. “L'arrivée de la 8e BB sur le front a constitué un grand soulagement pour le commandement égyptien en ce sens qu'elle a permis de stabiliser le front, empêchant ainsi les forces israélienne de gagner davantage de terrain, mais aussi de permettre la relève des troupes égyptiennes (…)”, peut-on lire dans El Djeïch qui publie un fac-similé de la lettre de remerciements du commandant de la division blindée égyptienne aux éléments de la 8e BB. Subissant quelques pertes humaines et matérielles, les forces algériennes engagées dans ce combat ne rentreront au pays qu'en juin 1975. La présence des forces armées algériennes, deux années durant, a permis à nos soldats, comme le souligne le mensuel de l'ANP, de s'aguerrir aux techniques de combat moderne, notamment les pilotes qui se trouvaient et pour la première fois engagés dans des opérations réelles. “Nos pilotes ont pu ainsi (…) s'affirmer et affiner leurs aptitudes à travers des combats aériens et de vol à basse altitude (moins de 50 mètres).” En 1978, l'Egypte signait les accords de Camp David qui lui ont permis de récupérer le Sinaï, et le Golan syrien est toujours sous occupation israélienne. Mais ce conflit, pour la très jeune Algérie indépendante, aura par ailleurs permis de jauger les capacités de nos forces armées sur le terrain de la guerre. SAMIR BENMALEK