L'ancien Chef du gouvernement décrit son dernier ouvrage, Radioscopie de la gouvernance algérienne, comme “un regard à l'intérieur du système par un instrument en dehors du système”. L'ancien Chef du gouvernement Ahmed Benbitour était hier l'invité du Salon international du livre d'Alger (Sila), où il a présenté son dernier ouvrage paru chez Edif 2000 Radioscopie de la gouvernance algérienne. Cet ouvrage, sur fond de parcours personnel de l'auteur — de Ghardaïa au Palais du gouvernement — se décline comme une lecture critique des cinquante dernières années vécues par le pays. Dans son intervention, il a essayé de répondre à trois questions, à savoir “pourquoi ce livre ?”, “pourquoi ce titre ?”, “quel contenu ?” La première question trouve sa réponse dans le fait que les dernières cinquante années vécues par l'Algérie sont celles de “la renaissance” et que vu leur importance, “il est nécessaire qu'elles soient fixées par des écrits et des analyses”. En parlant d'analyse, Benbitour considère qu'il y a deux approches : celle du penseur, du théoricien et celle de l'acteur, le pragmatique. “J'ai la chance de vivre 50 dernières années comme un acteur, comme un observateur privilégié, j'ai pensé utile de contribuer à l'analyse de cette période”, explique l'ancien Chef du gouvernement. La deuxième question, à savoir le choix du titre, se veut comme “un regard à l'intérieur du système par un instrument en dehors du système”. L'auteur affirme avoir privilégié “la méthode objective”, pas forcément en opposition avec le subjectif, tout en s'en tenant aux faits, négligeant les opinions. Le contenu du livre commence par une introduction dans laquelle Benbitour tente de décrire les difficultés au début des années 90, tout en notant l'amélioration sensible aujourd'hui et dire en fin de compte que “ce n'est pas de la génération spontanée, ni le fait d'un homme providentiel, mais le travail réfléchi et planifié d'une équipe à laquelle j'ai appartenu”. Il s'agit pour l'ancien ministre des Finances d'offrir un éclairage sur cette expérience, la sienne et celle de sa génération, et “donner l'espoir objectif pour peu que les affaires soient entre les mains des compétences nationales authentiques”. Au-delà d'offrir cette perspective, Benbitour tente de diagnostiquer aussi son propre “cas” pour trouver des explications à sa propre ascension qu'il qualifie d'ailleurs d'“assez rapide”. D'autant plus, explique-t-il, “je suis quelqu'un qui est venu d'une région lointaine saharienne, n'appartenant pas à un parti politique, un clan du pouvoir, ne disposant pas de ressources financières nécessaires”. Cette ascension est-elle alors le fait du hasard ? Un accident de l'histoire ? Le fait d'un déterminisme ? Benbitour opte pour la dernière hypothèse, à savoir un déterminisme qui est, selon lui, “le résultat de l'engagement d'une famille pour la lutte de l'indépendance bien avant 1954”. En effet, Benbitour évoque son enfance militante, la vie communautaire, comme un exemple parmi d'autres de l'engagement militant des régions sahariennes dans la lutte pour la libération nationale. Ces régions du Sud, comme il le rappelle assez justement, représentent 88% du territoire national. “Quelle aurait été l'indépendance de l'Algérie sans ces régions sahariennes ?” s'interroge Ahmed Benbitour qui déplore que l'engagement des militants du Sud n'ait pas la contrepartie qui lui revient dans l'histoire de la révolution. Dans la dernière partie de son ouvrage, l'auteur pose les jalons des perspectives politiques qui s'offrent au pays, “particulièrement au moment où l'économie s'enfonce dans la rente pétrolière qui est une ressource non renouvelable”. Constat désabusé de Benbitour à ce propos en affirmant que “l'exploitation des ressources n'est même pas optimale pour les générations actuelles. Elle sert le reste du monde au détriment de l'économie nationale, et donc elle n'est pas au service des générations futures”. D'où pour Benbitour la nécessité et l'urgence d'une nouvelle politique de développement qui ne soit pas, précise-t-il, un programme de développement. Où est la différence ? “Une politique de développement suppose une intégration du système politique, économique et judiciaire. Ce sont les trois qu'il faut réformer en même temps pour les préparer à une nouvelle politique”. N. sebti