Pour la première fois, l'Etat s'associe pleinement avec le mouvement associatif pour créer un réseau national de lutte contre les violences à l'égard de la gent féminine. Le ministère délégué auprès du ministre de la Santé, chargé de la Famille et de la Condition féminine vient de finaliser un avant-projet portant stratégie nationale de lutte contre la violence à l'égard des femmes qu'il compte soumettre à l'examen et validation aux différents intervenants sur la question, ce matin à l'Institut algérien des hautes finances. C'est à la suite de nombreuses réunions avec les partenaires institutionnels et la société civile, durant l'année en cours, que ce document a pu être élaboré. Financée en partie par les Nations unies, représentées par ses trois structures qui sont le Fnuap, l'Unicef et l'Unifem, la stratégie nationale de lutte contre les violence à l'égard des femmes entrera dans sa phase opérationnelle en 2007. Hier, les différents secteurs concernés par le problème étaient en conclave pour tenter de nouer des liens susceptibles de leur permettre de travailler plus efficacement et d'abréger le circuit de recours de la femme battue. Le but de cette initiative, explique la directrice du projet, Mme Wahida Boureghda, “est de renforcer les mécanismes d'intervention permettant de prévenir ou de lutter contre ce genre de violences dans la perspective de les réduire”. Le recours à ce genre d'action est motivé, poursuit-elle, par la persistance, voire l'aggravation du problème des violences à l'égard des femmes. Le constat, dit-elle, est inquiétant : “Nous avons un taux palpable de femmes violentées, mais nous pensons qu'il existe un chiffre noir. La prise en charge de cette catégorie de la population n'étant pas pour l'instant suffisante, nous voulons former un circuit de façon à ce que chaque service oriente la victime vers un autre pour éviter qu'elle se perde dans le labyrinthe des procédures”. La stratégie nationale de lutte contre les violences à l'égard des femmes, telle que révélée dans le document qui sera soumis aujourd'hui au vote et auquel nous avons pu avoir accès, repose sur trois domaines d'intervention : le premier vise à assurer la protection et la sécurité de la femme, assurer une prise en charge appropriée et une gestion clinique pointue de la violence exercée sur la femme et garantir une assistance juridique. Le second domaine a trait à l'organisation de la solidarité par le biais de la réinsertion économique et sociale de la femme et la protection de la petite fille et de l'adolescente. Enfin, le troisième domaine d'intervention consiste en la mise en œuvre de mesures, procédures et réformes sur le plan juridique, légal, constitutionnel et créer des coalitions et des alliances et conduire un plaidoyer pour le changement. Près d'une vingtaine d'associations ont été impliquées dans ce travail, auquel ont été associés également des députés, des chercheurs, des experts, des universitaires, les éléments de la gendarmerie et de la police. À la question de savoir si le département de la Famille et la Condition féminine a une idée sur le nombre des femmes violentées en Algérie, on nous répondra que l'Institut national de santé publique a rendu public dernièrement le chiffre de 900 000 victimes, et qu'il faudra attendre la fin de l'enquête initiée par le ministère délégué à la Famille pour avoir une idée plus globale sur tous les aspects liés à ce phénomène. Car ce qu'il faut retenir est que la stratégie nationale de lutte contre la violence à l'égard des femmes met en relief, cette fois-ci, le caractère multidimensionnel de la violence en insistant sur l'aspect physique, juridique, social, comportemental et sexuel dans les divers espaces de vie et donc au sein de la famille, en milieu scolaire, au sein des autres institutions sociales ou dans l'espace public. Nissa Hammadi