L'ex-général de brigade américain Janis Karpinski, ancien responsable des centres de détention en Irak, accuse l'ex-secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, d'avoir directement ordonné les sévices sur des détenus, dans un entretien publié samedi par El Pais. “J'ai vu un mémorandum signé par Donald Rumsfeld sur l'utilisation de ces méthodes d'interrogatoire”, a déclaré Mme Karpinski au quotidien espagnol. “La signature manuscrite était au-dessus de son nom (...) et dans la marge du document, il avait écrit : S'assurer que cela soit respecté”, a précisé cette ancienne responsable, qui a été le seul officier supérieur sanctionné par la hiérarchie militaire dans l'affaire des sévices infligés à des détenus de la prison d'Abou Ghraïb. Janis Karpinski a accepté de témoigner dans la plainte, déposée le 14 novembre dernier en Allemagne par un collectif d'avocats internationaux, contre Donald Rumsfeld et plusieurs autres hauts responsables américains pour leur rôle dans des sévices sur des prisonniers en Irak et sur la base américaine de Guantanamo (Cuba). Les méthodes préconisées “consistaient à obliger les prisonniers à rester debout longtemps, à les empêcher de dormir, à perturber les horaires des repas, à leur mettre de la musique à plein volume, à les faire se sentir inconfortables (...) Rumsfeld autorisait ces techniques spécifiques”, a affirmé l'ancienne responsable militaire américaine. “Tout a commencé en septembre 2003 avec la visite en Irak du général Geoffrey Miller, commandant suprême de la prison de Guantanamo. Il a été envoyé par le secrétaire à la Défense (...) afin d'apprendre aux membres du renseignement militaire les techniques d'interrogatoire les plus dures déjà utilisées à Guantanamo”, a déclaré Janis Karpinski. À propos des photos des prisonniers subissant des sévices à Abou Graïb et publiées dans la presse internationale, Mme Karpinski affirme que ces clichés n'ont pas été pris pendant des interrogatoires musclés, mais “pour faire pression sur les autres prisonniers”. “Je peux vous l'assurer, si ces photos avaient été prises pendant les interrogatoires, elles n'auraient jamais été rendues publiques”, a-t-elle dit. Interrogée sur les raisons qui l'ont poussée à témoigner contre M. Rumsfeld, Mme Karpinski, rétrogradée à la suite de cette affaire, explique que “les vrais responsables n'ont pas été mis en cause” dans l'enquête diligentée par le Pentagone dans le scandale d'Abou Ghraïb. “C'est mal d'accuser les autres de quelque chose, mais accuser une personne dont on sait pertinemment qu'elle n'est pas responsable, afin de pouvoir fuir ses responsabilités, pour moi, c'est un signe de lâcheté”, a-t-elle déclaré. R.I./Agences