Les débats organisés, jeudi dernier, par le quotidien El Watan autour de la question de la corruption ont été modérés, dépassionnés et essentiellement orientés vers des solutions qui réduiront un tant soit peu les méfaits provoqués par ce phénomène. C'est l'esprit avec lequel est venue d'ailleurs Mme Fatiha Talahit, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), aborder ce sujet. Elle a rappelé que certaines affaires ont ébranlé le monde économique, politique et médiatique en Algérie. La dénonciation et les grands déballages engendrent néanmoins, relèvera-t-elle, violence et injustice. L'heure, semble-t-elle vouloir dire, est à la sagesse et à la recherche d'issues à cette problématique au lieu de s'attarder sur la délation. Une chose est sûre, les effets destructeurs causés par ce fléau sont multiples. Plus de 1 000 milliards de dollars US sont, selon les statistiques de la Banque mondiale, reprises par Mme Huguette Labelle, présidente de Transparency International, perdus annuellement à cause de la corruption. Presque la même somme disparaît également sous forme de blanchiment, indiquent les chiffres du FMI. “Le prix est énorme. Des montants exorbitants sont dirigés vers des paradis fiscaux, dans des banques à travers le monde, des établissements achetés avec un argent illicite”, constatera Mme Labelle. Les instruments de lutte contre la corruption utilisés par Transparency International ont pour fondement, soulignera sa présidente, la transparence et l'intégrité à faire valoir dans chaque pays. L'un de ses principaux outils : la mise en place de conventions de lutte avec toutes les institutions du monde dont l'OCDE, les Nations unies, l'Union africaine… Plus de 140 pays ont signé cette convention. Deux systèmes sont, avouera la présidente de Transparency, essentiels pour la lutte contre cette maladie qui ronge le monde. Il s'agit du système financier et celui de la justice. Le juge doit être intègre, mais aussi compétent et professionnel. Toutes les finances de l'Etat doivent être, en outre, claires, publiques, transparentes et accessibles. “Il ne faut pas que les revenus du pétrole soient placés dans un fonds spécial qui n'apparaît pas dans le budget de l'Etat”, lancera Mme Huguette Labelle. L'intégrité des institutions étatiques, telles que les impôts, les douanes, la police… doit être aussi de mise. Un autre problème est soulevé par la conférencière. Entre le corrompu et le corrupteur, il existe, précisera-t-elle, les facilitateurs ou les entremetteurs. Ce sont, selon elle, des cabinets d'avocats, notaires, comptables, d'investissements qui rendent licite et légitime cet argent issu de la corruption, puis l'investissent ailleurs. La solution proposée en filigrane par M. Jean Cartier Bresson, professeur agrégé des universités à l'Université de Versailles, c'est de mener l'économie vers une bonne gouvernance qui impose des réformes institutionnelles et des politiques publiques. Pour lui, l'équation reste posée : est-ce le manque de croissance qui crée la corruption ou le contraire ? Sans pessimisme, il affirmera : “Un monde sans corruption est un rêve !” Badreddine K.