Cuba a accueilli, vendredi, la plus importante délégation de parlementaires américains depuis 1959, moins de quinze jours après la main tendue de Raul Castro à Washington et alors que le chef de l'Etat, Fidel Castro, a disparu de la scène politique. Les dix parlementaires — six démocrates et quatre républicains — sont conduits par Jeff Flake, élu républicain de l'Arizona, et William Delahunt, démocrate du Massachusetts. Tous deux sont membres de la Commission des affaires étrangères de la Chambre et partisans déclarés d'un assouplissement de l'embargo américain contre Cuba, en vigueur depuis 1962, et d'un réchauffement des relations avec l'île communiste. “Cette visite intervient à un moment important. Nous espérons rencontrer les dirigeants du pays ainsi que d'autres personnalités, et nous espérons lancer une nouvelle et longue ère dans les relations entre Cuba et les Etats-Unis”, a déclaré à la presse Jeff Flake à son arrivée. “Nous sommes dix parlementaires, dont une majorité en faveur de plus de dialogue entre les Etats-Unis et le gouvernement de Cuba, et ce voyage va beaucoup aider à avancer vers ces objectifs”, a ajouté le représentant républicain. Les Etats-Unis ont rompu en 1961 leurs relations diplomatiques avec le régime de Fidel Castro. Ils sont représentés depuis 1978 par la Section des intérêts américains à La Havane, qui fait office d'ambassade. “Nous voulons faire une analyse de la situation, voir ce qui se passe et contacter les personnes-clés du gouvernement. C'est un premier pas, après ce que nous avons entendu l'autre jour”, avait déclaré avant son départ William Delahunt, faisant allusion aux récentes déclarations de Raul Castro. Ce dernier, qui assure l'intérim depuis la maladie de son frère, avait proposé, le 2 décembre, de “résoudre à la table des négociations le contentieux prolongé entre les Etats-Unis et Cuba”. Le numéro deux cubain, qui s'exprimait à la tribune du défilé militaire organisé pour les 80 ans de Fidel Castro, absent pour des raisons de santé, avait mis comme condition que Washington respecte l'indépendance cubaine. La déclaration du dirigeant cubain “est sujette à beaucoup d'interprétations”, avait estimé William Delahunt, “mais nombre de mes homologues l'interprètent comme un signal de son désir d'établir un certain type de dialogue”, avait-il ajouté. De source proche de la délégation, on a indiqué à La Havane que les parlementaires américains devaient rencontrer le président du Parlement cubain, Ricardo Alarcon, spécialiste des relations avec les Etats-Unis, le ministre cubain des Relations extérieures, Felipe Perez Roque, le ministre-président de la Banque centrale, Francisco Soberon, ainsi que le ministre des Industries, Yadira Garcia. Une rencontre est également prévue avec le cardinal Jaime Ortega, archevêque de La Havane. Une entrevue avec Raul Castro ou avec le vice-président Carlos Lage n'est pas exclue, a-t-on indiqué de même source. La presse officielle cubaine, seule autorisée, n'a pas fait état de la visite, mais a publié, jeudi, un long éditorial dans Granma dénonçant l'aide financière de Washington à la dissidence cubaine.