Le démantèlement de cellules djihadistes liées à Al-Qaïda et au GSPC démontre la tentative de l'organisation de Ben Laden de s'implanter dans le nord de l'Afrique, après avoir installé des réseaux dans le Sahel. La mise hors d'état de nuire de 12 “dangereux criminels” et l'arrestation de 15 autres, mercredi dernier en Tunisie, et le démantèlement le même jour, au Maroc, d'une cellule de plus de 60 membres spécialisée dans le recrutement de volontaires pour l'Irak ayant des liens directs avec Al-Qaïda laissent penser que la nébuleuse islamiste d'Oussama Ben Laden poursuit sa stratégie d'implantation dans le Maghreb. Si les autorités tunisiennes ne veulent pas donner des indications sur la nature des “criminels”, de nombreux observateurs y compris des organes de presse locaux voient en ces “criminels” des terroristes apparentés à des salafistes ayant des liens avec Al-Qaïda. Même si le réseau a été, selon la presse tunisienne, anéanti en deux temps, il n'en demeure pas moins que le nombre des éléments composant ce “foyer” évalué à une trentaine d'hommes suggère une tentative des groupes armés liés à Al-Qaïda de constituer des bases en Tunisie. Il faut savoir que le groupe de criminels a été délogé avec le concours de l'armée. Par ailleurs, l'opération d'anéantissement de ce groupe intervient une semaine seulement après l'arrestation, à Meftah, près d'Alger, de deux terroristes tunisiens appartenant à Al-Qaïda qui s'apprêtaient à rejoindre les maquis du GSPC. Les deux terroristes venaient de Libye où ils étaient en contact avec d'autres organisations terroristes comme le GICL (Groupe islamique combattant libyen). Au Maroc, c'est le Groupe islamique marocain combattant (GIMC) qui serait derrière les opérations de recrutement pour l'Irak. Même si plusieurs de ses chefs ont été emprisonnés en 2005, d'autres éléments auraient repris le flambeau et ont continué à mener dans la discrétion des activités subversives. Ce sont eux qui sont aujourd'hui pointés du doigt dans cette nouvelle affaire liée au recrutement de volontaires pour l'Irak. Le Maroc a d'ailleurs désigné les membres de la cellule que ses services de sécurité viennent d'arrêter comme appartenant à Al-Qaïda et d'être en relation avec le GSPC algérien. On sait qu'à El-Oued, dans le Sud algérien, un réseau spécialisé dans le recrutement de volontaires pour l'Irak a été démantelé. Quelques jours plus tard, ce sont d'autres membres de réseaux versés dans la même activité qui seront arrêtés dans la capitale. Pour la nébuleuse islamiste, l'installation d'une filiale dans cette partie de l'Afrique a un double objectif : atteindre facilement l'Europe, actuellement difficile d'accès, et surtout l'utilisation de groupes salafistes maghrébins pour mener les attentats dans le Vieux continent. Le GSPC, qui a rallié Al-Qaïda depuis plus de quatre mois est, aux yeux d'Al-Zawahiri, le seul groupe qui puisse coordonner ces activités qui visent, dans un premier lieu, à structurer la filiale Al-Qaïda pour le Maghreb et le Sahel. L'attentat de Bouchaoui contre une entreprise américaine s'inscrit, à juste titre, dans cette stratégie. L'impact recherché par cet attentat n'est pas seulement médiatique, mais il est aussi mobilisateur dans le sens où il veut donner une autre dimension aux activités du GSPC. La guerre des Américains en Irak, l'agression contre le Liban et l'embargo imposé aux Palestiniens sont les principaux ingrédients qui poussent ces jeunes à se porter volontaires pour l'Irak. Al-Qaïda, qui se charge de ces expéditions, n'hésite pas à détourner parfois ces jeunes de leurs aspirations initiales en les orientant vers les maquis de leurs pays respectifs. Ces recrutements vont encore gagner de notoriété avec l'abominable opération de pendaison du président irakien. “Ce sont ces bêtises qui nourrissent les sentiments de haine envers certaines puissances accusées d'humilier les Arabes et les musulmans”, nous a confié un officier chargé de la lutte antiterroriste qui ajoute que ces jeunes se déclarent, au nom du djihad, volontaires à mourir en martyr. Et la mort de Saddam dans les conditions qu'on connaît n'arrange nullement les choses. M. T.