Selon cet ancien membre du Conseil de la révolution, le président de la République est disposé à les recevoir. “Le Président est un compagnon de longue date. Nous avons des entretiens réguliers”, confie Ahmed Bencherif. Très sûr de l'aboutissement de sa démarche, l'ancien colonel de l'ALN assure que Abdelaziz Bouteflika est très sensibilisé sur le dossier des faux moudjahidine sur lequel il veut également faire la lumière. Selon M. Bencherif, une telle détermination explique la disposition du chef de l'Etat à le recevoir ainsi que le groupe qu'il a constitué autour de ce dossier. “Nous formerons une délégation et nous irons le voir bientôt”, révèle le colonel sans plus de précisions. Hier, il tenait une réunion à son domicile à Alger pour mettre sur pied la stratégie de campagne en faveur de l'assainissement du dossier des maquisards usurpateurs. Un secrétariat a même été mis en place. À côté de M. Bencherif, siègent une douzaine de personnalités dont Benyoucef Mellouk, révélateur du scandale des magistrats faussaires, le colonel Mustapha Abid, ancien sénateur et coordinateur du Mouvement de redressement du FLN à Oran, Ahmed Bensaïd, chef de la Fédération nationale des enfants de chouhada, le Dr Nabila Benboulaïd, fille du martyr de la Révolution Mustapha Benboulaïd, ainsi que le fils de Ali Mellah, autre figure illustre de la guerre d'indépendance. Les membres du secrétariat ont élaboré une plate-forme de revendications ainsi qu'un programme de travail incluant des rencontres avec les moudjahidine au niveau de toutes les wilayas historiques. Le premier rendez-vous aura lieu à Oran le 30 janvier prochain. Suivront des rassemblements similaires à Blida (le 8 février), à Tizi Ouzou le 15, à Khenchela le 22, à Skikda le 29 et le 12 mars. Selon M. Mellouk, les assises ont été préparées avec soin. Même les autorisations pour la location des salles auraient été obtenues. Autant de facilités laissent évidemment penser que les pouvoirs publics sont favorables à la démarche de Bencherif et de ses compagnons. En sa qualité d'ex-membre du Conseil de la révolution s'étant illustré notamment par la mise en échec du coup d'Etat de Tahar Zbiri en 1965, le colonel jouit encore d'une certaine aura au sein du cercle présidentiel. D'ailleurs, il est à se demander si M. Bencherif n'est pas l'exécutant d'une démarche réfléchie en haut lieu. Ses critiques ont commencé il y a quelques mois. Le colonel avait adressé une missive au ministre des Moudjahidine s'élevant contre la mainmise d'un groupe de faussaires sur la direction de Djelfa. Peu à peu, il a entrepris de rallier à sa cause d'autres mécontents. L'un des derniers est M. Mellouk que des proches du colonel sont allés voir chez lui à Blida. Lassé de sa guerre contre des moulins à vent, l'ancien fonctionnaire du ministère de la Justice a accueilli les visiteurs et leur projet avec un grand enthousiasme. “Le dossier des magistrats faussaires est inscrit en priorité dans la plate-forme du groupe”, salue-t-il. Encore tabou, l'affaire des faux moudjahidine suscite des déclarations en dents de scie des autorités. Il y a deux ans, le ministre Chérif Abbas avait avancé le chiffre de 10 000. Dernièrement, Saïd Abadou, secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine, avait assuré qu'il n'y a aucun dossier. Pour sa part, l'actuel Chef du gouvernement et patron du Front de libération nationale se contente d'affirmer que l'affaire est prise en charge par l'Etat. Néanmoins, sa proximité du colonel Abid est révélatrice de son engagement personnel dans le dossier. S. Lokmane