Le tribunal a poursuivi hier ses auditions en entendant les directeurs d'Office de promotion et de gestion immobilières. Si la wilaya, le nom, le montant varient d'un inculpé à l'autre, le constat est le même. Le préjudice causé aux OPGI, la focalisation du tribunal sur les commissions versées dans des sous-comptes et l'insistance des inculpés sur le fait que la tutelle ne pouvait qu'être au courant des dépôts. Premier d'une longue série où seule la ville et le montant varient, Abdelhamid Ouail, directeur d'unité à l'OPGI de Relizane sera le premier à s'expliquer sur le dépôt de 30 millions de DA versés par son unité à l'agence d'Oran. L'ex-responsable dira que la convention a été signée par sa “direction générale”. “Je n'ai fait que poursuivre l'opération”. Il a agi, dira-t-il, sur instruction de sa DG qui avait négocié les taux d'intérêt des dépôts. Le préjudice est estimé à 11 milliards de centimes. Il niera avoir perçu des commissions pour ce dépôt, ni avoir utilisé un sous-compte spécial dans lequel 1% d'intérêt était versé au niveau de l'agence d'Oran. Saïd Bacha, son directeur général, a répondu aux mêmes questions. Les pertes évaluées s'élèvent pour l'OPGI de Relizane à 80 millions de dinars, résultat du premier dépôt, et 30 millions de dinars de l'unité autonome de l'OPGI. Saïd Bacha dira qu'il a reçu la visite de responsables du groupe Khalifa une semaine après son installation, lui proposant un taux d'intérêt supérieur à celui de la BDL où étaient déposés les fonds de l'office. Plus précisément 10,25%. Il rappellera que le décret 93-08 a conféré l'autonomie de décision et de gestion des fonds aux OPGI. À la présidente qui l'interpellait sur la commission de 300 000 DA supposée avoir été répartie entre les responsables de l'office, Saïd Bacha contestera le fait. “Je n'ai entendu parler de l'existence de ce compte qu'une fois devant la brigade de la Gendarmerie nationale”, dira-t-il. Kherireddine El-Oualid, actuel DG de l'AADL, a comparu hier pour les dépôts effectués par les OPGI d'Oran et de Constantine quand il en était le directeur. Il dira qu'il a été nommé en décembre 2000 à Oran. Trois mois après il recevait la visite de “Kacha, Belaïd Kechadet Ighil Meziane”. Ils étaient venus négocier le transfert des fonds vers KB contre un taux d'intérêt de 12%. “Le conseil d'administration a accepté le dépôt”. Par contre, ces dépôts ont été portés à la connaissance du ministère à travers des “fiches techniques mensuelles” lui étant adressées sur les différents placements. Représentant le budget des OPGI, ces fiches comportaient les montants, les taux et l'organisme bancaire où ils ont été déposés. Pour lui, le ministère avait “instruit” les OPGI pour “investir les excédents de la trésorerie”, tout en infirmant avoir été instruit “par écrit ou oralement” pour effectuer des dépôts au niveau d'El Khalifa Bank. Il dira avoir signé la convention avec Hakim Guers, le directeur de l'agence KB d'Oran. Les dépôts se sont faits progressivement jusqu'à atteindre 100 milliards de centimes. L'OPGI n'a jamais pu les retirer. Par contre, les intérêts ont été retirés à chaque échéance. Il niera avoir reçu des commissions arguant que le taux d'intérêt proposé était en soi largement incitatif, 12,25%. Les commissions versées dans des sous-comptes, selon la présidente et le procureur général, étaient de l'ordre de 5 millions de dinars et 2,5 millions de dinars, il n'en entendra parler qu'après sa convocation. Kheiredine El-Oualid précisera également qu'il n'existait pas de “comptes courants” à l'agence et qu'il ne pouvait y avoir donc de sous-comptes. L'ex-DG de l'OPGI d'Oran a estimé que “ces écritures sont internes à El Khalifa Bank, l'OPGI n'a appris leur existence qu'une fois la liquidation de la banque prononcée”. Ses dires seront confirmés par le directeur des finances et de la comptabilité de l'OPGI d'Oran. Un premier dépôt pour trois mois de la somme de 420 millions de dinars a été effectué, selon lui, le 26 février 2001. En sa qualité de DG de l'OPGI de Constantine, Kheiredine El-Oualid a conclu une autre convention avec Kechad Belaïd pour un dépôt de 20 millions de dinars au niveau de l'agence de Chéraga, d'un compte courant de l'OPGI de Constantine, après son affectation à ce poste le 13 mai 2002. Il dira qu'il n'a fait que poursuivre la politique tracée par son prédécesseur, M. Boucherfa, qui avait déjà déposé 142 milliards de centimes. La présidente dira que ce dernier a reconnu l'existence d'un sous-compte spécial. Kheiredine El-Oualid reconnaîtra lui avoir demandé une carte de voyages sur les lignes de Khalifa Airways qui lui sera remise par Kechad Belaïd. À la présidente qui l'interpellait à ce sujet, il dira : “Le seul souci, c'était d'économiser chaque sou pour l'office.” Son prédécesseur à Constantine, Boucherfa Ahmed, expliquera qu'en décembre 2000, il a été nommé à ce poste alors qu'il assurait l'intérim. Les fonds de l'office étaient déposés à la Badr et au Trésor public. Ces fonds avoisinaient, selon la présidente, 80 milliards de DA. La Badr proposait au maximum 8,6% d'intérêt. L'OPGI avait des comptes courants à KB. Il recevra une délégation de KB venant d'Alger composée des directeurs d'agence KB de Blida, Chéraga et Saint-George. Les négociations porteront sur un dépôt de 142 milliards de centimes. La convention sera signée en février 2002. Il dira avoir demandé à cette délégation la possibilité d'un prêt d'un montant de 5 millions de DA, chose qui sera acceptée. “Le 17 février, ils sont revenus accompagnés d'une personne que je ne connaissais pas. Kechad Belaïd m'a informé qu'il apportait la convention de prêt et son montant. Je lui ai dit lève-toi… Lui affirmant que j'étais un homme de loi. Ils me convaincront d'accepter le montant”. À la présidente qui insistait sur le fait qu'il s'agissait du même jour où la convention de placement était signée et qui l'interrogeait sur la contrepartie de ce prêt, l'accusé lancera : “Je ne suis pas un voleur.” Il ne s'agissait ni de son “intention”, ni de son “but”. Elle lui demandera alors combien de logements sociaux peuvent être construits avec 142 milliards de centimes, la réponse est “à peu près 800”. Il niera également l'existence de sous-comptes. Samar Smati