Après dix jours de bombardements et d'intenses combats au sol, les forces coalisées sont loin d'avoir réalisé les objectifs que s'étaient fixés au départ leurs états-majors. Le général quatre étoiles, Tommy Franks, commandant en chef des forces américano-britanniques, tente à chacune de ses sorties médiatiques de minimiser et la résistance irakienne et les pertes humaines et matérielles dans ses rangs. La situation sur le terrain n'est guère conforme aux objectifs tracés par les stratèges du Pentagone, avant le déclenchement des hostilités. Le nombre terrifiant de missiles de croisière et de bombes, qui se sont abattus depuis le 20 mars sur le territoire irakien, et les milliers de soldats engagés dans les batailles n'ont pas permis pour l'instant d'atteindre le but de cette guerre, à savoir, le renversement de Saddam Hussein. Pour montrer aux forces d'invasion leur échec et les faire douter davantage, le maître de Bagdad multiplie les discours télévisés au cours desquels il montre une sérénité et une assurance qui ne laissent pas de place à l'affolement malgré la force destructrice ennemie. Dès le début, il a déjoué toutes les tentatives adverses visant à décapiter son régime, réduisant ainsi à néant les visées de Washington et de Londres. Avant même l'entrée dans la bataille des forces spéciales, en l'occurrence la Garde républicaine, l'armée des coalisés n'est pas parvenue à encercler Bagdad dans les délais fixés. Qu'en sera-t-il de la suite de la guerre lorsqu'il s'agira de la prise de la capitale irakienne ? Les experts militaires estiment que cette ultime bataille n'est pas gagnée d'avance pour les soldats américano-britanniques. Elle risque de durer plus longtemps que prévu par les stratèges US, surtout que la chute du régime ne sera effective qu'avec la capture ou la mort de Saddam Hussein. Mais, comme ce dernier sera bien à l'abri dans son bunker, quasi-indestructible à en croire ses constructeurs yougoslaves qui affirment qu'il peut résister à un siège de six mois et que même une bombe atomique n'en viendrait pas à bout, le renversement du régime irakien ne sera pas une sinécure. Ceci sans tenir compte de la résistance dont feront preuve la Garde républicaine, les soldats de l'armée régulière maintenus à Bagdad dans cette optique et également les milliers d'adhérents du parti Baâs, armés pour la circonstance, et dont beaucoup, dit-on, seraient suffisamment entraînés à l'art de la guérilla urbaine. Il y a lieu de ne pas oublier l'absence d'aide aux alliés de la part de la population, qui nourrit une haine apparente vis-à-vis des forces “d'occupation”, particulièrement après le bombardement de zones civiles, qui a fait un nombre effarant de victimes. Les Américains et les Britanniques, qui tablaient beaucoup sur un soutien important de l'opposition et plus particulièrement des civils, devront revoir tous leurs calculs. Les dix premiers jours de la guerre montrent clairement que les alliés ont rencontré sur le champ de bataille des aléas qu'ils n'avaient point pris en compte. Les dernières déclarations de George Bush et de Tony Blair, laissant entendre que la fin de la guerre est encore assez éloignée, sont une autre preuve que la réalité du terrain a faussé toutes leurs prévisions. K. A.