Chassée de l'actualité par la normalisation de la situation, l'Algérie y a retrouvé une très large place. Et avec fracas. Au point de chasser elle-même le point le plus brûlant au monde : l'Irak. Avec l'attentat qui a visé l'un des centres névralgiques du pouvoir, le pays s'est retrouvé étalé en une de la presse mondiale, en Europe, en Amérique et en Asie, et en ouverture de tous les journaux, radios et télés. En France, malgré une excitante campagne électorale, entrée dans sa ligne droite, les attentats d'Alger ont pris une large place dans les médias. Avec en relief deux questions qui taraudent les autorités et les spécialistes : y a-t-il un risque d'attentat en cette fin de campagne électorale comme ce fut le cas en Espagne en 2004 et y a-t-il un lien, une connexion entre les actes perpétrés en Algérie, au Maroc et en Tunisie ? En visant le palais du gouvernement, les auteurs de l'attentat se sont en tout cas payé une opération comme jamais n'a pu le faire le GIA et le reste de la nébuleuse terroriste dans les années les plus sombres de la violence. Avec l'explosion des nouvelles technologies, l'Algérie ne peut plus être le champ d'une guerre “à huis clos” comme on le qualifiait dans les années 1990. Tant mieux ! Les kamikazes ont un visage et leurs commanditaires se sont chargés de diffuser leur portrait sur internet. Avec des reprises garanties dans la presse mondiale. Derrière ces visages ne se cachent pas l'ombre de soldats. Il n'y a plus que Libération pour essayer de faire croire à une manipulation de la violence. Toujours à contresens de la réalité la plus visible. “Des kamikazes, inspirés directement ou pas par Al Qaïda, ont-ils une stratégie visant à embraser le Maghreb et la fameuse "zone grise" du Sahel, plus au sud ?" interroge le journal. “La multiplication d'attentats "réussis" en Algérie, ou manqués, mais sanglants, en Tunisie et au Maroc, dans lesquels le GSPC algérien est mis en cause, le laisse supposer. D'autant que ce groupe a proclamé, en septembre, son ralliement à Al Qaïda en se rebaptisant branche armée d'“Al Qaïda au Maghreb islamique"”. La revendication par cette organisation des attentats en Algérie et les “contacts” entre les djihadistes du Maghreb, régulièrement exhibés par les services de sécurité, ont fait le reste. “La coïncidence des opérations de mardi à Casablanca et le lendemain à Alger a encore renforcé cette hypothèse”, répond le journal, avant d'avertir que “les choses sont pourtant plus complexes”, et d'affirmer que l'Algérie veut se faire déléguer par les Etats-Unis le rôle de leader de la lutte antiterroriste dans le Maghreb. S'autoflageller jusqu'à s'affaiblir et apparaître ensuite comme le champion : il n'y a que ce journal pour oser une telle incongruité sous la plume de sa spécialiste ex-Algérie. Plus pertinente, sa correspondante à Alger a utilisé une métaphore footballistique pour décrire la nouvelle désillusion que doivent affronter les Algériens qui commençaient à se croire installés dans la tranquillité. “Le marché est truqué”, écrit-elle. Et de relever : “Quinze années d'alternances, d'embellies sécuritaires suivies de flambées terroristes, avec toujours au pouvoir la même politique d'exclusion, de prédation et d'arrogance, ont usé la capacité des Algériens à regarder vers les tribunes officielles”. Tribunes officielles ? Ce sont, par exemple, les tribunaux qui font mine de juger Abderezak el Para en le proclamant “en fuite” alors qu'il est censé se trouver entre les mains des autorités après avoir été extradé du Tchad. Ces incroyables maladresses font le miel de tous ceux voient se profiler l'ombre d'un “agent” derrière chaque terroriste. Et Libération s'est fait un bonheur de le rappeler… Pour Le Monde “Al Qaïda pour le Maghreb veut s'inscrire dans le djihad globalisé". L'influent quotidien note que “lorsqu'une multinationale change de nom, elle lance une campagne de communication” mais “lorsque le GSPC a annoncé qu'il devenait Al Qaïda pour le Maghreb islamique, les spécialistes de l'antiterrorisme ont redouté le pire, en Algérie comme en Europe". Des craintes qui viennent d'avoir confirmation avec les attentats kamikazes d'Alger avec une cible qui ressemble à un “défi” et à une “véritable démonstration de force”. La crainte noue la cour de la France “comme après chaque attentat islamiste aux portes de l'Hexagone”, relève Le Figaro. Pour lequel “le double attentat d'Alger, mercredi matin, ravive le spectre du terrorisme sur le sol français”. À l'appui, le journal rappelle que “la France constitue une base de recrutement et de repli pour bien des islamistes radicaux”. Avec des filières irakiennes, filières afghanes qui n'en finissent pas d'alimenter les rôles de la justice. Autre crainte, Alger va-t-elle “replonger dans la période noire ?” La question concerne avant tout les Algériens. Mais, déjà tout le monde scrutera les prochaines élections législatives... Y. K.