Le commissaire européen à l'Elargissement a appelé l'armée turque à rester en dehors du processus électoral, au lendemain d'un avertissement lancé par l'état-major contre toute remise en cause du principe de laïcité en vigueur dans le pays et à la suite des difficultés rencontrées par le candidat à la présidence de la République turque, l'islamiste Gùl, ministre des Affaires étrangères et numéro 2 de l'AKP majoritaire au Parlement. Le commissaire européen a même menacé de recourir à un veto pour l'entrée d'Ankara à Bruxelles, une européanisation pour laquelle militent les islamistes qui ne fait pas consensus au sein de l'armée. L'armée turque, garante de la Constitution laïque héritée d'Atatürk, a lancé, vendredi soir, en pleine élection présidentielle au Parlement, un fort avertissement contre toute remise en cause du principe de laïcité en vigueur dans le pays, accusant le gouvernement issu de la mouvance islamiste, d'inaction face au développement d'activités islamistes. Le chef du gouvernement, Erdogan, devait retirer sa candidature face à la désapprobation de la société civile qui a manifesté à Ankara et à Istanbul et son remplacement par Gùl, plus modéré, a fait remonter à la surface le débat sur la laïcité au travers du hidjab de son épouse. Des manifestations sont prévues aujourd'hui pour conforter l'avertissement de l'état-major turc qui a rappelé sa mission de protecteur déterminé de la laïcité. Pourtant, Gùl, comme de nombreux membres du parti au pouvoir de la Justice et du Développement (AKP), se définit comme un démocrate conservateur ayant renié ses positions islamistes passées. L'AKP n'a cesse de répondre que la démocratisation initiée par le gouvernement Erdogan représente autant de tests pour voir si les forces armées turques respectent les arrangements démocratiques et les valeurs démocratiques de l'Europe. La Turquie a commencé en octobre 2005 des négociations d'adhésion à l'UE qui pourraient durer au moins dix ou quinze ans ! Mais, son chemin est loin d'être balisé : la France, pour ne citer que ce pays, est contre l'adhésion d'Ankara à l'UE, pour des raisons culturelles et civilisationnelles. Le probable successeur de Jacques Chirac n'a pas caché sa détermination de barrer la route de Bruxelles aux Turcs qui n'ont rien à voir avec le caractère judéo-chrétien de l'Europe géographique. D. B.