L'organisation du mouvement migratoire du Maghreb et du reste de l'Afrique, caractérisée principalement par une gestion sécuritaire en Europe, “devrait passer à une gestion qualitative et de confiance”, a estimé, hier à Alger, le président du Centre d'information et d'études sur les migrations internationales (Ciemi), M. Vincent Geisser. “Il faut organiser la délivrance des visas de manière plus souple pour créer une sécurité pour le migrant et lui éviter d'entreprendre des actes clandestins et illégaux”, a indiqué M. Geisser en marge du colloque en hommage au sociologue Abdelmalek Sayad, organisé par le Centre national des recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH). Faisant état actuellement de “mentalités craintives” en Europe à l'égard des mouvements migratoires des populations du Maghreb et du reste du continent africain, M. Geisser a plaidé pour la mise en place d'accords de coopération entre les deux rives de la Méditerranée, notamment dans les domaines de la recherche et universitaire. Il a proposé, à titre d'exemple, la création de cursus universitaires franco-maghrébins ou euromaghrébins, réitérant qu'“il faut passer d'une gestion de l'émigration/immigration frileuse et craintive vers une gestion de circulation et de confiance”. En outre, M. Geisser a rejeté l'idée de recourir à “la politique du codéveloppement”, qui préconise d'aider les pays en difficultés économiques et sociales afin de diminuer l'immigration, affirmant que “l'envie de migrer n'est pas liée uniquement à la difficulté économique, mais, il s'agit aussi d'une volonté de pouvoir circuler, de découvrir d'autres sociétés et d'acquérir de nouvelles expériences professionnelles”. L'interlocuteur a enfin averti que l'immigration clandestine subsistera tant que l'Europe “ne fait toujours pas confiance aux migrants, en pensant qu'ils tenteront de violer la loi pour rester dans les sociétés d'accueil”. En revanche, l'historienne au Centre national français de recherche scientifique (CNRS), Mme Fabienne Le Houerou a estimé que l'“unique solution” pour l'Europe d'atténuer le phénomène migratoire clandestin “est d'aider ces gens à être bien chez eux, en leur apportant les outils pour se développer économiquement et assurer une stabilité politique”. Elle a insisté sur le fait que les gens, notamment en Afrique, “migrent parce qu'ils sont mal chez eux”. R. N./APS