Un char américain abat rageusement sa stèle sous les acclamations des Irakiens. Images de la triste fin d'un impitoyable dictateur. Un groupe de jeunes s'acharnent sur le socle de la stèle de Saddam Hussein, érigée au milieu de la place Al-Firdaws à Bagdad. A coups de massue et autres marteaux de fortune, ils tentent d'abattre le “grand Raïs” en bronze. Ils veulent rapidement le descendre de son piédestal. Du haut de son régime qu'il a conquis par le feu et le sang. Qui l'aurait cru ? Qui aurait cru qu'un jour, les Irakiens qui répugnent viscéralement le grand tyran, en cachette, puissent, par une aussi belle journée de printemps, lui cracher au visage. Pousser des youyous de joie après la chute de son régime. Et, suprême injure : uriner sur son portrait… Ce sont là, quelques-unes de ces images historiques qui resteront gravées dans la mémoire collective des Irakiens, mais aussi dans celle de l'opinion publique internationale. Les “Saddam dictateur”, “Saddam traître” et “Saddam tortionnaire”, résonnaient comme autant de rancoeur et de rancunes longtemps couvées, et que les Irakiens ont bruyamment éructées à la face du monde, pour dire leurs malheurs, leurs privations et leur soif de justice et de liberté. Hier, le régime de Saddam Hussein est parti comme celui de Staline et celui de Ceausescu. Il est allé rejoindre la poubelle de l'histoire. Il rejoint aussi la meute des terribles dictateurs des temps modernes à l'image de Staline, d'Hitler et de Pinochet dont le souvenir donne encore des frissons à ceux qui ont vécu sous leur joug. Le mythe du “Raïs” “indétronable” est tombé hier, au centre de sa citadelle. Comme l'a été sa stèle et celle de Staline. Les Irakiens, si sevrés de liberté, s'en sont donnés à cœur joie de transpercer ses entrailles et de piétiner son buste, même en bronze, sous le regard amusé des marines américains. Quelle terrible fin de règne pour ce mégalomane qui, il y a quelques jours encore, promettait de transformer Bagdad en immense tombeau pour les Américains et les Britanniques. Il s'est finalement enterré dans ce tombeau qu'il a lui-même creusé. Celui d'avoir régné sans partage, mais surtout sans pitié pour son peuple, trois décennies durant. N'en déplaise à Saddam Hussein et à sa cour du régime Baâs, terrés quelque part, les soldats de George Bush et ceux de Tony Blair furent accueillis en libérateurs. Les scènes de liesse populaire et les concerts de klaxons observés, hier après- midi, dans les rues de Bagdad, sont autant de ouf de soulagement poussés par une population qui en avait visiblement gros sur le cœur. Qui voulait tout simplement vivre dignement comme toutes les populations de la planète. Les Irakiens n'aiment pas forcément les Américains, même s'ils les ont bien accueillis. Ils ont juste manifesté, spontanément, leur désir ardent d'en finir avec ce régime dictatorial de Saddam. De s'extirper de cette terrible main de fer qui les étreint depuis très longtemps. Et oui, la liberté en valait la peine. H. M.