Le directeur général de la Chambre algéro-allemande de commerce et d'industrie revient dans cet entretien sur le 10e Forum germano-arabe, qualifiant l'événement de réussite. Il relève le déficit en communication accusé par l'Algérie, mais aussi les contraintes qui entravent l'acte d'investissement. Liberté : Les travaux du 10e Forum germano-arabe, dont le partenaire cette année est l'Algérie, viennent de s'achever. Peut-on en connaître votre sentiment ? Andreas Hergenröther : Je crois que c'est un signe fort qui a été donné. L'Algérie, en tant que grand pays du Maghreb, était le partenaire de ce forum. Une grande délégation algérienne a participé et montré l'intérêt des opérateurs algériens pour nouer des relations d'affaires avec des hommes d'affaires allemands mais aussi arabes, étant donné la présence aussi en force cette année d'opérateurs arabes venus de plusieurs pays. Je pense que sur ce plan, la manifestation était une réussite, au cours de laquelle nous avons beaucoup communiqué sur l'Algérie et sur son potentiel économique. C'est là où réside le défi de l'Algérie, celui de communiquer d'une manière intensive et régulière sur les progrès des réformes en Algérie et sur son potentiel économique. Pour notre part, notre souhait est de coopérer plus étroitement avec les institutions algériennes afin de mieux promouvoir la destination Algérie pour les potentiels investisseurs. Vous pensez que sur ce plan il y a un déficit en communication ? Dans une certaine mesure, oui. Comme vous le savez, il n'y a pas d'antenne de l'Agence nationale pour le développement de l'investissement à l'étranger ni d'ailleurs de l'Agence algérienne pour la promotion des exportations. L'Algérie est en compétition avec les pays voisins, en particulier, et ceux de la région arabe en général. La Tunisie, par exemple, depuis un peu plus de trente ans, a une représentation de l'Agence tunisienne de la promotion des investissements en Allemagne. Le Maroc est également présent en Allemagne et en France afin de promouvoir son potentiel économique. Pour être compétitif, il faut constamment communiquer. Nous sommes un partenaire. En tant que Chambre de commerce et d'industrie algéro-allemande, nous communiquons beaucoup sur l'Algérie. Nous avons organisé plusieurs manifestations en Allemagne pour promouvoir le potentiel économique de l'Algérie. Nous avons accompagné plusieurs délégations d'hommes d'affaires algériens en Allemagne. Mais cela ne suffit pas, parce que nous sommes aussi, en partie, une institution allemande. Dans ce cadre, il faut le soutien des institutions algériennes. Il faut que l'Algérie soit plus présente dans les grands pays européens et fasse de la promotion active, non seulement de son potentiel économique, mais aussi des conditions cadres pour réaliser des affaires en Algérie, qui répondent d'ailleurs aux exigences des investisseurs. Mais si ces réformes et ce potentiel ne sont pas connus, comme c'est le cas pour les Allemands, comment voulez-vous que les investisseurs étrangers manifestent leur intérêt à investir en Algérie ? Quel est le niveau des investissements allemands en Algérie ? Actuellement, il y a plus de 140 entreprises installées à travers des succursales et des bureaux de liaison en Algérie. C'est un développement très positif. Il y a cinq ans, le nombre ne dépassait pas les 30 représentations. Au niveau de la Chambre de commerce, nous sommes 320 membres. Nous étions à peine 43 membres il y a deux ans. C'est la preuve d'un développement positif et de l'intérêt des entreprises allemandes pour le marché algérien. L'Algérie peut profiter davantage de l'intérêt que portent sur elle les investisseurs allemands et européens potentiels, si elle communique mieux et si elle adapte aussi ses procédures aux exigences des investisseurs. En Tunisie, en 24 heures, vous pouvez constituer une société. Il en est de même pour le Maroc. Justement, quelles sont les entraves que les investisseurs soulèvent quand ils viennent en Algérie ? C'est surtout la question des procédures. La constitution d'une société prend beaucoup de temps. Il y a plusieurs administrations qui interviennent. En théorie, le guichet unique existe, mais dans la pratique... Et puis, cela dépend de la région, et ce ne sont pas toutes les administrations concernées qui sont représentées au niveau du guichet unique. Pour la privatisation, c'est une procédure très lourde. L'éventuel repreneur négocie avec des partenaires, l'entreprise publique qui n'est pas mandatée pour décider ni la Société de gestion des participations. Les négociations durent parfois un an, voire un an et demi. Cette procédure n'encourage pas les investissements dans le cadre de la privatisation. Au contraire, cela donne un effet assez négatif. Pour la sous-traitance, que nous souhaitons encourager, il faut un système douanier très performant, informatisé et qui donne toutes les facilités aux exportations. Car, aujourd'hui en Europe, c'est la livraison “just in time” qui est en vigueur. J'ai discuté avec un opérateur allemand qui a investi au Maroc, qui a créé 10 000 postes d'emploi et qui veut lancer une autre ligne de production dans un pays d'Afrique du Nord. Il est en train de comparer les conditions entre l'Algérie, la Tunisie et l'Egypte. Il nous a posé des questions précises sur la durée d'attente au port et sur le système douanier. Au Maroc, la durée d'attente ne dépasse pas une heure. Les zones franches sont à développer. Y a-t-il des projets qui sont actuellement en négociation ? Oui, des contrats sont en négociation actuellement. Des projets sont sur le point d'être réalisés dans le cadre de partenariats privés. Il y a aussi des investissements dans le cadre des privatisations. Mais, au risque de me répéter, les procédures sont assez lourdes et décourageantes pour les investisseurs. Et puis, certains investisseurs ne sont pas accueillis comme ils le souhaitent, et ne rencontrent souvent pas les instances vraiment compétentes pour les soutenir dans leurs démarches. Entretien réalisé par Meziane rabhi