Près de quatre années et demie après le renversement de Saddam Hussein par les forces multinationales sous commandement américain, l'Irak fait toujours face à un regain de violences interconfessionnelles et interethniques en dépit du déploiement de 155 000 soldats américains à travers le pays. Il y a quelques jours, George Bush annonçait sa satisfaction de l'amélioration constatée ces derniers jours sur le plan sécuritaire en Irak. Il faut croire qu'il est le seul à positiver la présence militaire américaine dans ce pays, où le nombre de victimes par jour entre civils ou militaires de la violence est effarant. Environ une trentaine d'attentats, dont le nombre de victimes avoisine ou dépasse la centaine, dont la moitié en 2007, ont été enregistrés depuis l'occupation de l'Irak en mars 2003. Le dernier en date est celui de mardi soir dans la région de Mossoul où au moins 200 personnes ont été tuées dans quatre attentats au camion piégé visant une minorité religieuse. Il s'agit des “Yézidis”, des préislamiques. C'est une communauté, dont les membres sont estimés à quelque 500 000 personnes, et une minorité religieuse de langue kurde installée dans le nord de l'Irak et qui considère le Diable comme le chef des anges. Les fidèles de cette religion ésotérique, créée au XIIe siècle par cheikh Adi ben Moussafir, né à Damas et mort en 1160 à Lalish, au Kurdistan, vénèrent principalement Malak Taus, qui dirige les archanges et est souvent représenté par un paon. Le bilan, initialement de 175 morts, pourrait encore s'alourdir avec de possibles victimes sous les décombres. “Plus de 200 personnes ont été tuées et 375 blessées”, a indiqué à la presse Dakhil Qassim Hassun, le maire de Sinjar, ville du nord de la province de Ninive où se sont produits les attentats, mardi, dans deux villages habités par la secte préislamique des Yézidis. Des responsables locaux et militaires irakiens ont indiqué que quatre camions piégés ont explosé dans les villages d'Al-Khataniyah et d'Al-Adnaniyah. Réagissant à ces attentats, l'ambassadeur des Etats-Unis à Bagdad, Ryan Crocker, et le commandant des forces américaines en Irak, le général David Petraeus, ont condamné ces attentats qualifiés de “barbares” tout en se disant déterminés à poursuivre leur mission. Ils se sont encore laissés aller à des déclarations rassurantes en affirmant : “Cette violence cruelle ne fait que renforcer notre détermination à poursuivre notre mission contre les terroristes qui infestent l'Irak.” La Maison-Blanche, quant à elle, n'a pas manqué de dénoncer ces “attentats contre des civils innocents”, les qualifiant de “barbares”, et accusant les extrémistes d'“empêcher l'Irak de devenir un pays stable et sûr”. En butte à une grave crise politique en raison des dissensions entre partis sunnites et chiites, qui risque d'emporter son gouvernement, le Premier ministre irakien Nouri El-Maliki a dénoncé ce “crime ignoble” et ordonné une enquête. Il a ajouté dans un communiqué rendu public : “Ce crime ne nous empêchera pas de faire face aux défis et de poursuivre le processus politique.” En attendant, l'Irak que Saddam Hussein avait maintenu uni et stable pendant plusieurs décennies, vit l'enfer au quotidien. L'épée de Damoclès d'un éclatement du pays plane plus que jamais sur la tête des Irakiens, qui ne savent plus où donner de la tête. Cela sans oublier ceux qui ont fui le pays, sacrifiant tout ce qu'ils avaient de cher. Tout cela, c'est le prix à payer et la conséquence de l'occupation américaine de l'Irak qui a transformé un Etat stable en enfer. Il est à souhaiter que le pire ne soit pas à venir, pour ce peuple qui a eu droit à la place de la libération du joug de la dictature, un pays à feu et à sang. K. ABDELKAMEL