Certes, la région ne dispose pas d'un grand tissu industriel, mais les rares unités qui y activent sont modernes et compétitives. Les investissements montés à Oued Souf sont essentiellement orientés vers le conditionnement de la richesse locale : la datte. Deux grandes unités, Souf Datte et le groupe Mehri, prennent en charge le traitement, le conditionnement et la commercialisation de la quasi-totalité de la production locale. La société d'exploitation agricole Daouia, appartenant à l'homme d'affaires Djillali Mehri, est avant tout un grand domaine s'étendant sur plus de 600 hectares gagnés sur le désert. Gérée selon les normes modernes, cette exploitation dispose de 13 forages dont 7 atteignant une profondeur de plus de 208 mètres, ce qui leur procure un rendement important évalué à 341 litres par seconde et par puits. La phoeniciculture (culture des palmiers dattiers) occupe une superficie totale de 200 hectares, où sont plantés pas moins de 20 234 palmiers dont 13 836 plants de Deglet Nour. Quant à l'oléiculture (olive à huile et de table), elle s'étale sur une superficie de 30 hectares. Nouveauté dans ce désert, la culture des asperges verte et blanche. Pour le moment, un seul hectare est dédié au développement de ces deux variétés pas encore très connues en Algérie. “Ici, l'asperge est à maturité 30 jours avant les variétés les plus précoces cultivées au Maroc. Les essais que nous menons nous ont permis de les mettre sur le marché dès le début du mois de janvier. Les variétés précoces valent très cher en Europe, jusqu'à 12 euros le kilo”, affirme Hocine Belabaci, directeur du domaine. Le même interlocuteur évoque les problèmes de transport à Oued Souf, où il n'y a que trois dessertes aériennes hebdomadaires reliant cette ville à Alger : “S'il y avait des vols vers des villes européennes, nous pourrons développer la culture des asperges et d'autres variétés de primeurs.” Par ailleurs, l'ingénieur chargé de l'oléiculture, Khalfi Chabi, estime que l'huile produite dans la région est de très bonne qualité, car présentant un très faible taux d'acidité. “Nous avons réalisé une production de 1 300 litres d'huile extravierge en 2006. Nous disposons d'une huilerie moderne sur place. Nous avons aussi produit durant la même période 60 quintaux d'olives de table”, affirme l'ingénieur spécialisé en oléiculture. Toujours dans le même domaine, il y a lieu de signaler une expérience unique en son genre dans le Sud : la reproduction et l'élevage ovins. Les deux bergeries en exploitation actuellement comptent 900 têtes. Ce domaine emploie 110 travailleurs permanents et fait appel en haute saison à 240 travailleurs saisonniers. L'irrigation au goutte-à-goutte est une technique en vigueur dans cette exploitation. Le domaine dispose aussi d'une unité moderne de traitement et de conditionnement de la datte produite sur place et destinée exclusivement à l'exportation. “Nous exportons toutes les variétés de dattes. Si la Deglet Nour demeure la variété la plus demandée sur le marché mondial, nous avons réussi à placer, et ce, pour la première fois en 2006, des quantité de dattes sèches et de la pâte de dattes”, ajoute M. Belabaci. Souf Datte est la deuxième unité de la ville spécialisée dans le conditionnement de la richesse locale. Il s'agit, en réalité, de l'ex-unité de l'Office national des dattes, cédée dans un premier temps aux travailleurs avant d'être rachetée par l'homme d'affaires Rezzag Barra Lakhdar qui a réussi à la sauver et à en faire ensuite une entreprise viable. Pour le moment, l'entreprise traite des dattes achetées auprès des fellahs mais, dans une deuxième phase, l'investisseur compte se lancer dans la culture des palmiers. Pour le moment, il traite quelque 900 tonnes de dattes par an et il escompte parvenir à des quantités plus importantes lorsqu'il exploitera ses propres palmeraies. Il regrette que les unités algériennes n'aient pas les certifications de sécurité alimentaire (IFS et ISO 22000) : les sésames qui ouvrent la voie de l'exportation sans passer par des intermédiaires étrangers. “Pour le moment, nous sommes contraints de vendre notre production à des grossistes marseillais qui se chargent de l'exporter ensuite vers les pays d'Amérique du Nord, d'Amérique latine et d'Asie”, se plaint M. Rezzag Barra. Il affirme aussi que le marché à l'exportation existe, mais il reproche aux pouvoirs publics de ne rien faire pour rendre à la datte algérienne la place qui devrait être sienne sur les marchés internationaux. “Les Tunisiens ont réussi à se positionner sur les places mondiales, et avec une datte de moindre qualité. Leurs responsables politiques ont aidé leurs producteurs nationaux, mais cette culture commerciale n'est pas encore développée en Algérie”, déclare-t-il encore. Il n'arrive pas à comprendre pourquoi seulement 20 tonnes de dattes sont exportées chaque années alors que l'Algérie produit en moyenne 470 000 tonnes par saison. Il formule le vœu de voir les pouvoirs publics encourager les investisseurs algériens pour participer aux foires internationales qui se trouvent être des plates-formes ouvrant les voies aux marchés internationaux. En plus de cette unité de transformation de dattes, Rezzag Barra exploite, toujours à Oued Souf, une unité de céramique. Autre domaine d'investissement, l'unité de production de parfums Wouroud appartenant à Mohamed Bachir Djeddidi. “Nous aussi sommes sanctionnés par le problème du transport aérien. J'ai dû renoncer à un contrat avec l'Afrique du Sud car Air Algérie refuse de transporter des produits contenant de l'alcool”, estime M. Djeddidi. Le créateur du Parfum “Sixième Sens” se déclare fier d'avoir réussi à implanter ses unités de production dans sa ville natale. “Mon père avait son usine à Alger. À ma sortie de l'université, j'ai réalisé notre nouvelle usine, et je peux vous garantir que l'expérience est une totale réussite”, déclare-t-il. Il possède aussi une imprimerie disposant des équipements les plus modernes. Ses unités emploient plus de 200 travailleurs permanents. S. I