Il est vrai que parler aujourd'hui en Algérie de pollution sonore soulève l'étonnement général alors que d'une façon plus large la pollution ordinaire, celle des déchets ménagers, par exemple, est une question irrésolue dans toutes les grandes agglomérations. Et pourtant ce que les spécialistes évoquent en termes de “nuisance sonore” est un véritable problème de santé et de développement. Le bruit, en tant que polluant de l'environnement urbain, fait l'objet à l'étranger d'études et de mesures pour en limiter les effets sur la santé des citoyens. Aujourd'hui nous en sommes très loin dans notre pays alors qu'il est reconnu que “le bruit est la cause de stress, d'anxiété, d'hypertension, de trouble du sommeil et de surdité…”, comme il est précisé dans une étude réalisée par des chercheurs du laboratoire de recherche en santé environnementale. Ces bruits sont d'autant plus nuisibles en période estivale comme l'on peut le constater dans tous les quartiers de la ville d'Oran. Il y a tout d'abord les mariages célébrés sur des terrasses de bâtiments qui, jusqu'à deux heures du matin, vont faire jouer l'orchestre des nuits de noces, à fond les décibels. El Hadja, une brave grand-mère retraitée, se plaignait à juste titre et à qui voulait bien l'entendre de ses voisins qui, pour célébré le mariage de leur fils, n'ont respecté ni les vieux ni les bébés, surtout lorsque la canicule a mis à mal leur organisme toute la journée : “De la musique jusqu'à l'aube, mon petit-fils de 10 ans n'a pas arrêté de pleurer… Il faut respecter son voisin, il y a les salles des fêtes pour faire les mariages…” Ces salles des fêtes souvent sont réalisées en plein milieu urbain et aucune précaution de construction pour limiter l'impact du bruit n'a été prise. Des enquêtes commodo incommodo sont censées être menées avant l'implantation de telles structures. Autre phénomène cause de stress et de tension, cette pratique qui pousse les Algériens à se lancer dans des travaux d'aménagement de leurs appartements. Dans toutes les cités vous vous retrouvez ainsi dès 8 heures du matin en plein mois d'août réveillé par des coups sourds de massue s'abattant sur des murs faisant vibrer toutes les fondations et cela peut durer des jours entiers du matin au soir. Peut importe si cela puisse incommoder les voisins… Tout cela sans oublier les coups de klaxon tonitruants des revendeurs d'eau, des chiffonniers... Tous ces aspects, en plus d'être des sources de nuisances physiques, sont aussi source de conflits de voisinage et la preuve des difficultés pour la population à adopter des comportements urbains et de bon voisinage comme l'expression ancienne le consacrait. Et pourtant la nuisance sonore en milieu urbain est bien réglementée par un décret qui spécifie les normes de niveau sonore maximum. Ainsi ces normes prévoient que dans les zones d'habitation, les lieux et voies publics, le niveau sonore admis est de 70 décibels dans la journée et 45 la nuit. Pour ce qui est des zones de proximité des établissements hospitaliers et d'éducation, là aussi la norme admise est de 45 décibels la journée et 40 la nuit... L'étude réalisée à Oran prouve que toutes ces normes sont de loin dépassées. Les mesures effectuées par exemple au niveau des carrefours de la ville prouvent des dépassements de 4 à 25 décibels. D'autres mesures sonométriques effectuées à proximité du CHUO montrent là encore des dépassements de 15 à 30 décibels… Les niveaux constatés (60 à 75 décibels) sont ceux qui sont généralement présents dans les usines. C'est dire leur impact quoi de plus naturel alors quand on entend dire que les Algériens sont nerveux et hypertendus… F. Boumediène